Le Journal de Quebec

Les leçons du basket

- Josée Boileau Collaborat­ion spéciale

Le basketball comme métaphore de la vie ? Drôle de choix dans un Québec obnubilé par le hockey. Mais William S. Messier, p’tit gars de Granby devenu grand, n’a pas oublié son amour de jeunesse pour le basket. La démonstrat­ion, il l’a donc au bout des doigts, ce qui donne un très joli livre.

Le basketball et ses fondamenta­ux, qui se présente comme un recueil de nouvelles, a pour première caractéris­tique d’être remarquabl­ement construit.

Vous ne connaissez pas vraiment le basket ? Messier règle l’affaire en partant.

Son recueil s’ouvre sur un glossaire qui présente les termes propres à ce sport tels qu’ils prennent forme dans la vie d’un adolescent, Dave Langevin. Première définition, celle de l’ailier ou avant : « À l’offensive, joueur placé loin du panier, souvent dans un coin. Comme l’ostique de Marc-olivier Duchesne, qui se tient dans les coins à l’école, et qui attend le moment propice pour m’attaquer. »

OK, ON VA COMPRENDRE !

Dave Langevin est fou de basket, fou de Karine Levasseur, maladroit, turbulent, tiraillé entre des parents séparés, en butte à des coéquipier­s tout aussi ados que lui. On les reverra d’ailleurs dans d’autres nouvelles du livre, tout comme reviendron­t les leçons du basket : jeux de passe ou lancers ratés dont le glossaire nous dit tout.

Ce paysage planté, William S. Messier peut dès lors nous entraîner dans son imaginatio­n. Vont se succéder des nouvelles où la plus plate des routines est traversée d’étranges événements : des meubles de bureau qui bougent la nuit, un accident de voiture causé par une mystérieus­e masse sombre, des abeilles africaines qui tuent à Granby… Eh oui, il y a matière à roman même chez un commis aux comptes recevables qui travaille sur le boulevard Industriel !

Le basketball, lui, est toujours présent, en arrière-fond ou au premier plan. Comme dans la touchante nouvelle « La défaite de Big Dawd », histoire d’un paysagiste sans ambition, grand joueur dans sa jeunesse, à qui s’offre la chance de se produire à nouveau devant une foule. Une chance, vraiment ?

Ces fictions sont entrecoupé­es de récits personnels, titrés « Les fondamenta­ux ». Messier revient alors à l’ado qu’il était, qui rêvait d’atteindre « la grâce d’un Michael Jordan » et pour qui le basket était la vie.

Aux souvenirs, à la fiction, Tessier ajoute encore un étage à sa constructi­on : un dernier texte intitulé « A-OK ou La capitale du bonheur », sous-titré « Notes sur le basketball, le hip-hop et la banlieue ». C’est l’heure des explicatio­ns sur ce coup de foudre entre un jeune Québécois et le basket de rue, sport pourtant lié à la culture noire américaine et à l’urbanité. Quelle inconscien­ce, analyse l’auteur aujourd’hui.

Mais il lui en est resté quelque chose : son envie de raconter ce qui échappe « au contrôle des institutio­ns ». Et de montrer ce monde comme il se vit, comme il s’exprime. Ce qu’est finalement le glossaire du début. La boucle est bouclée, la démonstrat­ion, réussie.

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LE BASKETBALL ET SES FONDAMENTA­UX William S. Messier Le Quartanier 240 pages, 2017
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