Les chirurgies transférées au privé ont explosé
Le gouvernement du Québec a déjà payé plus de 9 millions de dollars pour ce projet-pilote
Les interventions chirurgicales du réseau public effectuées au privé dans le cadre d’un projet-pilote ont déjà coûté 9,2 millions $, soit plus du double du budget annuel de 4 millions $ prévu.
Au total, 11 036 interventions chirurgicales du réseau public ont été effectuées dans trois cliniques privées de la région de Montréal, de mai 2016 à juin 2017. La facture totale a atteint 9 260 410 $, selon les données du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS).
L’an dernier, le ministre de la Santé Gaétan Barrette a lancé un projet-pilote pour comparer le coût des opérations au privé et au public. Trois cliniques privées (Brossard, Mont-royal, Laval) ont été choisies pour l’étude.
Le budget annuel était estimé à « environ 4 M$ », financé par le programme d’accès à la chirurgie du MSSS. Or, la facture totale a été deux fois plus élevée en seulement 13 mois d’activités. Par ailleurs, seule la clinique de chirurgie DIX30 était en activité jusqu’à janvier 2017.
Par courriel, le MSSS répond que les cliniques sont remboursées sur la base des opérations réalisées, et que « le budget peut donc fluctuer en fonction du volume de chirurgies effectuées ». Il n’y a pas de quota maximal de patients admissibles par année.
Rappelons que les patients soignés au privé ne paient pas un sou, et qu’ils sont opérés par un médecin du réseau public. La clinique privée fournit les installations et l’équipe chirurgicale.
DÉMARCHE DÉTAILLÉE
Selon le MSSS, le projet-pilote, qui s’étend jusqu’en mai 2019, s’inscrit dans l’objectif du nouveau modèle de financement axé sur le patient. Les cliniques reçoivent le même montant pour la même procédure.
« On a une démarche de documentation très détaillée à fournir au ministère, dit Fernand Taras, directeur médical de la clinique Rockland MD. Mais comment ils vont comparer, je ne le sais pas. »
Par ailleurs, la clinique DIX30 a effectué 78 % de toutes les interventions jusqu’ici (voir tableaux), notamment beaucoup en ophtalmologie (dont les cataractes). En mai dernier, le Dr Barrette expliquait qu’il est normal que la clinique DIX30 ait fait plus d’opérations, puisqu’elle a débuté avant les deux autres.
À ce sujet, M. Taras croit que la complexité des cas a des répercussions sur le volume effectué.
« On fait des chirurgies beaucoup plus complexes, dit-il. Une cataracte, ça prend 15 minutes à faire. »
Hier, le MSSS a écrit que « la capacité chirurgicale des trois cliniques n’est pas la même », et qu’il ne s’est pas « engagé à répartir les versements totaux en parts égales à chacune des trois cliniques ». Au total, 14 salles sont disponibles.
DÉLAI DE NEUF MOIS
Par ailleurs, le MSSS souligne que les patients opérés au privé doivent être sur une liste d’attente depuis neuf mois. Or, l’hôpital Pierre-boucher (Longueuil) opère beaucoup de cataractes au DIX30 afin de désengorger les salles d’opération.
« Il n’y avait […] pas d’enjeu spécifique de délai lié à l’ophtalmologie », a répondu le service des communications.
Les directions des cliniques DIX30 et Opmédic n’ont pas rappelé Le Journal, hier.