Le Journal de Quebec

Il humilie sa femme et lui prend tout

Un homme de Mont-laurier qui a abusé de sa conjointe jusque sur son lit de mort lui a ensuite pris ses biens même si elle léguait tout à ses frères et soeurs.

- STÉPHAN DUSSAULT

La vie est parfois loin d’être un fleuve tranquille, même après 24 ans de vie commune.

En février 2013, Yock Mouy Thu Thon, 73 ans, était alitée et mourante à l’hôpital de Mont-laurier. Les visites de son conjoint Robert Bergeron étaient dérangeant­es au point où les patients de la chambre s’en sont plaints.

Le personnel de l’hôpital indique même être intervenu auprès de M. Bergeron pour qu’il « se soucie davantage du problème physique et psychologi­que de madame avant de l’interroger sur ses finances ».

Une compagne de chambre de Mme Thu Thon dit avoir entendu l’homme insister auprès de sa conjointe pour qu’elle lui donne le numéro d’identifica­tion personnel (NIP) de ses cartes de guichet. Surtout qu’il venait de découvrir qu’elle détenait 50000 $ dans un compte.

DÉNIGRANT

« Tu es une menteuse, tu avais des comptes de cachés », lui aurait-il lancé. Robert Bergeron soutenait qu’il demandait plutôt le code de déverrouil­lage de son cellulaire.

Il a aussi eu une attitude dénigrante envers elle, lui ordonnant d’arrêter de marcher « comme une Chinoise » en faisant de petits pas.

Lorsqu’elle sort de l’hôpital pour aller finir ses jours chez son frère Marc à Montréal, Robert Bergeron ne passera pas une fois la voir dans les cinq derniers mois de sa vie. Il expliquera au Journal que c’est parce que sa santé était fragile.

C’est au moment du décès que tout dégénère. Elle a beau ne rien avoir légué à son mari, celui-ci ne veut rien remettre au frère de la défunte, qui est liquidateu­r testamenta­ire. C’est pour cette raison que l’affaire se retrouve devant les tribunaux.

Robert Bergeron dit lui en vouloir de ne pas être couché sur l’héritage, mais il avoue que lui non plus ne lui lègue rien dans son testament.

C’est empreint de ressentime­nt face à sa conjointe décédée qu’il ment à plusieurs reprises à la succession, représenté­e par son frère Marc Thu Thon, qui l’envoie en Cour pour ravoir ses biens.

« Cette bataille judiciaire va me rester toute ma vie », dit M. Thu Thon, 75 ans, rencontré chez lui sur la rue de Marseille, à Montréal.

Bergeron dit d’abord ne pas détenir les meubles de sa femme, mais soutient plus tard avoir le droit de les garder vu leur longue relation. Il assure que ce n’est pas elle qui a acheté la laveuse et la sécheuse, mais la preuve est tout autre.

Il prétend qu’il ne sait pas qui a retiré près de 4000 $ du compte de la femme, mais la juge conclut que c’est bien lui qui l’a fait. Il dit qu’il a retiré un autre montant de 1258 $ pour payer des factures de sa conjointe, mais ne fournit aucune preuve.

Il assure que sa conjointe se faisait entretenir par lui, mais elle payait plusieurs dépenses du couple.

MANQUE DE RESPECT

Dans sa décision rendue l’an dernier, la juge dit que tout ça aurait été réglé simplement si Robert Bergeron « avait accepté de respecter les dernières volontés de Thu Thon et de remettre à la succession ce qui lui appartenai­t sans prétendre faussement qu’il ne détenait rien ».

Elle semonce aussi Marc Thu Thon, qui aurait affirmé que sa soeur avait un modèle d’auto plus récent que celui qu’elle avait réellement acheté, espérant peut-être obtenir plus d’argent.

La succession demandait 38213 $, le conjoint a répliqué en exigeant 19 280 $ pour le recours qu’il estimait abusif, et ce dernier a finalement été condamné à payer 6718 $, tout ça après deux jours d’audience. « Ça m’a coûté environ 7000 $ d’avocat pour récupérer à peu près le même montant », se désole Marc Thu Thon.

« La valeur des biens en jeu est minime en comparaiso­n des sommes que les parties ont investies respective­ment dans le procès qui les a opposés. Il est triste qu’elles aient choisi de s’opposer avec autant de véhémence, plutôt que de simplement honorer la mémoire de Thu Thon », conclut la juge dans sa décision.

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PHOTO PIERRE-PAUL POULIN, LE JOURNAL DE MONTRÉAL YOCKMOUY THUTHON 1940 - 2013 (73 ANS) Marc Thu Thon, le frère de la femme décédée, a accepté d’être photograph­ié par Lejournal à condition qu’on ne le reconnaiss­e pas.
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