Le Journal de Quebec

Philippe Couillard et la Patate à vélo

- SOPHIE DUROCHER sophie.durocher @quebecorme­dia.com

Alors, l’avez-vous fait samedi ?

Notre premier ministre, Philippe Couillard, l’a fait trois fois.

Jean-françois Lisée l’a fait aussi, mais on ne sait pas combien de fois.

Danièle Henkel l’a fait et elle a même encouragé d’autres à le faire, et en public en plus ! Quoi ? La brouette thaïlandai­se ? Non. Ce que le PM, le chef de l’opposition et l’ex-dragonne on fait samedi, c’est d’acheter un livre québécois.

ADOPTEZ UN LIVRE QUÉBÉCOIS

Je sais que cette initiative citoyenne, qui ne fait partie d’aucun programme gouverneme­ntal, est faite pour une bonne cause depuis maintenant quatre ans. Mais je ne peux m’empêcher de penser qu’une Journée du livre québécois, ça a quelque chose d’un peu… pathétique. Nos livres ont tellement besoin d’amour qu’on a besoin d’une journée pour qu’ils se fassent adopter, comme les minous abandonnés qui font pitié à la SPCA ?

Les Français ont-ils besoin d’une Journée du livre français pour acheter le dernier Virginie Despentes ou le font-ils spontanéme­nt ? Pensez-vous que les Américains, qui ont tous un drapeau patriotiqu­e devant leur maison, ont besoin d’une journée « Make American Books Great Again »?

La journée du livre québécois, pour moi c’est comme la Saint-valentin. Je n’ai pas envie de me faire dire que c’est cette journée-là que je dois manifester mon amour, alors que je peux le manifester quand je veux, comme je le veux.

De toute façon, ça ne veut rien dire, « acheter un livre québécois » tout court. Ça ne dit pas si on a acheté un truc bidon ou une oeuvre immortelle. Si on a acheté de la Chicklit nounoune, Le guide de l’auto ou La petite fille qui aimait trop les allumettes, le chef-d’oeuvre de Gaétan Soucy dont la version filmée sort bientôt sur nos écrans.

Quand je lis que des concitoyen­s achètent un livre québécois le 12 août « pour encourager » nos auteurs, je trouve que ça ressemble drôlement à la tablette de chocolat dont on n’a pas vraiment besoin, mais qu’on achète « pour encourager » notre neveu qui ramasse des sous pour son voyage humanitair­e au Guatemala.

Si on veut que les Québécois aiment leurs auteurs, il faudrait peut-être commencer par la base. Pourquoi ne valorise-t-on pas plus la littératur­e québécoise à l’école ? Pourquoi n’invite-t-on pas plus d’auteurs et surtout d’essayistes à la radio et à la télé, privées et publiques ?

Pourquoi n’y a-t-il plus, à la télévision de Radio-canada, d’émission consacrée aux livres ? Pourquoi Lire, animée par Claudia Larochelle, est-elle maintenant reléguée au web ?

VIVE LE QUÉBEC LIVRE

Philippe Couillard a acheté trois livres québécois dans une librairie indépendan­te de Sherbrooke, GGC. Il a choisi le dernier Michel Tremblay pour lui-même. Et pour ses petits-enfants Devant ma maison de Marianne Dubuc (un des livres préférés de mon fils) et Une patate à vélo de l’épatante Élise Gravel.

Mais la méthode Couillard n’a pas plu à tout le monde. Sur Facebook, sous la vidéo de son passage à la librairie, il s’est fait ramasser par de simples citoyens.

« Moi aussi, M. Couillard, j’achète des livres québécois. Cependant, je ne le fais pas devant la caméra de façon à ce que les électeurs me trouvent bon. Je trouve que votre méthode électorali­ste est désolante ».

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada