Le Journal de Quebec

La vie délirante de Will James

Olivier Dufault, petit-petit-petit cousin de Will James, né Ernest Dufault, a été nourri depuis sa naissance d’histoires de son mystérieux ancêtre parti faire fortune dans l’ouest américain. Il s’est inspiré de tout l’univers du fameux cowboy pour écrire

- MARIE-FRANCE BORNAIS » Olivier Dufault est professeur de lettres à Montréal.

Ernest Dufault, l’illustre ancêtre d’olivier, a quitté le Québec et sa famille à l’âge de 15 ans, en 1907, pour poursuivre son rêve de vivre dans l’ouest américain.

Changeant vite son nom pour celui de Will James, il est devenu cowboy, voleur de bétail, prisonnier, soldat, cascadeur puis illustrate­ur et auteur.

Ses récits ont obtenu un grand succès et, du milieu des années 1920 au début des années 1940, il publie un livre par année. My Life Story, son autobiogra­phie, est truffée de mensonges. Il raconte une pseudo enfance d’orphelin en Alberta et son éducation au Montana sous l’égide d’un vieux trappeur canadien-français.

Olivier Dufault s’est inspiré de tout cet univers et de la vie dissipée de Will James pour écrire Bénédictio­n.

Le roman palpitant, très évocateur des grands espaces désertique­s de l’ouest, raconte la vie du cowboy de la fin de 1914 à la première moitié de 1916, alors qu’il est enfin libéré de la prison fédérale de Carson City, au Nevada, pour avoir volé du bétail en Utah.

Des personnage­s pittoresqu­es comme le cuisinier Big Moose Tim aux amours avec Mrs Riordan, Olivier Dufault en met plein la vue. « Mon père m’en a parlé depuis très longtemps parce qu’on est issus de la même famille Dufault de Saint-nazaire d’acton. C’est un ancêtre très éloigné. »

UN IMPOSTEUR

Cet homme, parti très jeune aux États-unis sans même parler anglais, représente pour l’écrivain cette idée de l’artiste qui va au bout de ses rêves. « Il a caché complèteme­nt son nom et son origine – même à sa femme. Il s’est inventé une sorte de légende, mais personne ne connaissai­t sa véritable identité. À ses funéraille­s à Hollywood, on a annoncé à sa femme que la mère et le frère de Will James étaient présents. J’imagine son univers s’évanouir quand elle a compris qu’elle avait vécu dans le mensonge toute sa vie ! »

Olivier a fouillé dans les archives de l’université du Nevada, à Reno, pour se documenter.

« On a accès aux archives du premier biographe de Will James, et on voit plein de lettres qu’il a écrites à des amis de Will James qui ne voulaient pas parler de lui, pour ne pas détruire la légende. C’est un imposteur, finalement, cet homme ! »

MYTHE

« Ce qui m’a intéressé, c’est comment il a eu une existence légale à partir du mythe qu’il s’est lui-même créé. Il a volé du bétail et il est allé en prison : il est devenu Will James à jamais à partir de ce moment. Au-delà de la tristesse, du tragique et d’une certaine mythomanie qui était la sienne, il y a tout l’aspect très fort de l’homme qui a quitté un Québec qui l’étouffait, qui a changé de vie. Il a écrit 20 romans. »

Pour s’immerger complèteme­nt dans cet univers de cowboys du début du 20e siècle, Olivier a visité la plupart des endroits mentionnés dans le roman, lu les trois biographie­s de Will James, puis une très grande partie de son oeuvre.

« C’était un illustrate­ur très talentueux et tous ses livres foisonnent d’illustrati­ons. Il a beaucoup charmé les gens qu’il a rencontrés, avec ses dessins. Il les a dispersés aux quatre vents. Ce talent béni l’a aussi amené dans une voie tragique. »

Olivier Dufault Bénédictio­n Éditions Marchand de feuilles - 576 pages

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PHOTOS COURTOISIE

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