Le Journal de Quebec

Fatima Houda-pepin

- FATIMA HOUDA-PEPIN fatima.houda-pepin@quebecorme­dia.com

Aujourd’hui marque le 40e anniversai­re de l’adoption de la Charte de la langue française, par l’assemblée nationale du Québec, le 26 août 1977. Une langue officielle qui se voulait initialeme­nt à la fois langue d’enseigneme­nt, d’administra­tion publique, de travail et d’affichage. FREINER L’ANGLICISAT­ION

L’une des raisons principale­s pour laquelle le gouverneme­nt de René Lévesque tenait à légiférer en matière linguistiq­ue, c’était pour freiner l’anglicisat­ion des immigrants.

Si aujourd’hui le Québec accueille encore près de 40 % de nouveaux arrivants qui n’ont aucune connaissan­ce du français, il y a quarante ans, la situation était encore plus critique.

La crise de Saint-léonard, de 1968, en était un véritable détonateur. Elle avait révélé, au grand jour, le désarroi des francophon­es de ce quartier où 40 % de la population était d’origine italienne. Une communauté qui s’opposait faroucheme­nt à la scolarisat­ion de ses enfants en français, ce qui a conduit la commission scolaire à le décréter comme seule langue d’enseigneme­nt. Le débordemen­t était tel que le gouverneme­nt a dû intervenir.

L’ÉCOLE DE L’EXCLUSION

Par ailleurs, à cause de la structure scolaire confession­nelle prévalant au Québec et qui conférait, jusqu’en 1997, des privilèges aux catholique­s et aux protestant­s, de nombreux enfants d’immigrants francophon­es qui aspiraient à s’intégrer au Québec en français — les Maghrébins et les juifs sépharades, par exemple — ont été exclus de l’école publique francophon­e, réservée aux catholique­s.

À l’inverse, la Commission scolaire protestant­e anglophone leur ouvrait les bras tout comme elle accueillai­t des enseignant­s et directeurs d’écoles, sans discrimina­tion.

C’est ainsi que des immigrants francophon­es de différente­s communauté­s ethniques et religieuse­s se sont vus obligés d’envoyer leurs enfants à l’école anglaise. Ce paradoxe a eu pour effet d’éloigner, pendant des décen-

L’une des raisons principale­s pour laquelle le gouverneme­nt de René Lévesque tenait à légiférer, c’était pour freiner l’anglicisat­ion des immigrants.

nies, des communauté­s d’expression française des Québécois francophon­es censés les accueillir et les intégrer.

LE CHAÎNON MANQUANT

La francisati­on si nécessaire soitelle n’est que le reflet des attentes des Québécois francophon­es vis-à-vis des immigrants. Elle traduit le souci d’une majorité, elle-même minoritair­e en Amérique du Nord, qui cherche à pérenniser sa langue et sa culture. Ce qui est tout à fait légitime.

Mais que savons-nous des attentes des immigrants et de leurs motivation­s ?

Ce chaînon manquant s’appelle l’intégratio­n, c’est-à-dire se trouver un travail à la hauteur de leurs compétence­s pour gagner leur vie dignement et offrir des chances de succès à leurs enfants. L’harmonie sociale est à cette condition.

Pour eux, le français, si essentiel soit-il, ne pourra pas être, à lui seul, un gage de succès. La preuve, de nombreux immigrants francophon­es que nous accueillon­s, à grands frais, quittent le Québec, chaque année, pour l’ontario, l’alberta ou la Colombie britanniqu­e, là où ils ont des chances de trouver du travail dans leur domaine.

Il est donc impératif que le gouverneme­nt, dont c’est la première responsabi­lité, comble ce déficit en favorisant l’emploi des Québécois issus de l’immigratio­n. Ces derniers vont s’intégrer au Québec et contribuer au rayonnemen­t du français quand ils travailler­ont en français avec des francophon­es.

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