Le Journal de Quebec

Les chiens protégés, mais pas les gardiens

Le Syndicat des agents correction­nels déplore cette situation qui prévaut dans les pénitencie­rs fédéraux

- CLAUDIA BERTHIAUME

Les chiens renifleurs des pénitencie­rs fédéraux sont mieux protégés que les détenus et les gardiens contre les surdoses mortelles liées au fentanyl, déplore le Syndicat des agents correction­nels.

Les maîtres-chiens ont un antidote en leur possession, au cas où leur animal reniflerai­t la puissante drogue lors d’une fouille. La dose pourrait ainsi être administré­e rapidement au chien. Par contre, les agents correction­nels n’ont pas sur eux l’antidote de naloxone disponible sous forme de vaporisate­ur nasal.

« Ils ne veulent pas que les chiens meurent, mais moi, si j’en trouve [du fentanyl] dans un tiroir lors d’une fouille, ce n’est pas grave. C’est aberrant ! », déplore une source qui s’est confiée au Journal.

Généraleme­nt, l’antidote commercial­isé sous le nom de NARCAN ne se trouverait qu’à l’infirmerie ou dans le bureau d’un gestionnai­re correction­nel, loin des unités où vivent les détenus.

COMME L’EPIPEN

Et le temps est précieux lors d’une interventi­on, souligne le Syndicat des agents correction­nels du Canada.

« C’est correct que les chiens soient protégés, en autant que nous aussi », note le président régional du Québec, Frédérick Lebeau.

Pour intervenir plus rapidement, les agents souhaitera­ient en avoir sur eux ou à portée de main dans chacune des unités de vie, comme c’est le cas pour l’epipen, utilisé entre autres pour traiter des réactions allergique­s.

Le Syndicat presse le Service correction­nel du Canada (SCC) de donner plus de formation sur le fentanyl et de rendre le NARCAN plus accessible.

Après les rues de Montréal, le fentanyl — un analgésiqu­e 100 fois plus fort que la morphine — s’étend maintenant aux allées des pénitencie­rs.

« On manque cruellemen­t d’informatio­ns. Il y a un peu de panique qui s’installe », affirme M. Lebeau.

GRAINS DE SEL

Cet opioïde est extrêmemen­t dangereux, car seulement deux milligramm­es de fentanyl pur — l’équivalent de quatre grains de sel — suffisent pour tuer un homme.

« On est conscient qu’en institutio­n, on a rarement affaire à une substance pure. Mais le danger est là quand même et on ne peut pas prendre de risque avec ça », explique M. Lebeau.

La situation est préoccupan­te autant pour les détenus, qui pourraient consommer du fentanyl sans le savoir, que pour les agents correction­nels. Ces derniers pourraient en trouver par hasard lors d’une fouille.

Cet été, plusieurs gardiens auraient ainsi été intoxiqués dans des pénitencie­rs de l’ouest du pays. Quant à eux, des détenus et des agents du pénitencie­r de Donnacona auraient aussi eu besoin du NARCAN après avoir été en contact avec du fentanyl.

« Les employés ont accès au naloxone dans des délais rapides. Si une analyse du niveau de sécurité démontre que le risque est plus élevé dans un établissem­ent en particulie­r, il pourrait y avoir plus de naloxone en vaporisati­on nasale à la dispositio­n des employés », a écrit une porte-parole du SCC hier.

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