Le Journal de Quebec

La diplomatie américaine malmenée

- PIERRE MARTIN @Pmartin_udem

Aux Nations unies, Donald Trump a démontré que la diplomatie et la recherche des compromis nécessaire­s à la coopératio­n internatio­nale ne sont pas ses priorités, mais son discours n’était que la pointe de l’iceberg.

Devant L’ONU, Donald Trump a prononcé mardi un discours sans précédent. Fidèle aux promesses faites à son électorat isolationn­iste, il annonçait rien de moins que l’abandon de toute prétention à la diplomatie et au volontaris­me des États-unis sur la scène internatio­nale et leur remplaceme­nt par l’affirmatio­n de la puissance et la défense de l’intérêt national à courte vue.

Devant l’assemblée générale d’une organisati­on qui dépend de la volonté de ses membres de limiter l’exercice de leur souveraine­té, il faisait l’éloge du chacun-pour-soi.

AMERICA FIRST !

Bien sûr, un État ne peut pas négliger son intérêt. En revanche, l’intérêt réel à long terme exige souvent de faire des concession­s incompatib­les avec la vision myope de Trump.

Malgré sa réputation d’homme d’affaires pragmatiqu­e et « transactio­nnel », les discours et les actions du président américain vont dans le sens d’un abandon de la diplomatie.

Par exemple, son insistance à remettre en question presque toutes les ententes internatio­nales qui lient les États-unis – en particulie­r celles conclues par Barack Obama – lance le message à ses vis-à-vis que la signature des États-unis ne vaut pas le papier où elle est inscrite.

Cet abandon de la diplomatie ne se résume pas aux discours de Trump. Si ce n’était que ça, on pourrait les escompter en disant que ce n’est qu’un spectacle destiné à sa base électorale.

Loin des projecteur­s, l’administra­tion Trump se livre à un démantèlem­ent systématiq­ue des capacités diplomatiq­ues du pays.

Non seulement l’administra­tion n’a pas nommé de candidats pour un grand nombre de postes de haut niveau au départemen­t d’état, mais on assiste à un exode des experts de carrière dans plusieurs domaines clés.

En plus d’affaiblir la diplomatie, cette attrition du personnel compromet les capacités d’analyse qui permettent de gérer des crises comme celle qui touche la Corée du Nord.

Par-dessus le marché, les experts de toutes tendances s’entendent à dire que le secrétaire d’état Rex Tillerson n’est pas à la hauteur de son poste.

Trump se livre à un démantèlem­ent systématiq­ue des capacités diplomatiq­ues du pays

PARLER DOUCEMENT…

Il est de plus en plus difficile de déceler dans l’administra­tion Trump une volonté de mener ses relations internatio­nales sur une base autre que la loi du plus fort.

La puissance brute qu’il privilégie est importante, mais elle doit être accompagné­e de finesse et de diplomatie. C’est ce pouvoir discret, que les Américains appellent soft power, qui fait défaut à Donald Trump et que son administra­tion est en train de dilapider.

Theodore Roosevelt, un grand président qui croyait à l’affirmatio­n de la puissance en politique étrangère, avait comme devise « speak softly and carry a big stick ».

Le problème est que l’incapacité de parler doucement peut augmenter de beaucoup les risques d’utiliser le gros bâton, et ça, ça ne sert l’intérêt de personne.

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