Le Journal de Quebec

What the phoque en Alaska ?

- SOPHIE DUROCHER sophie.durocher @quebecorme­dia.com

Cet été, je révélais que le compte officiel Twitter en français du Gala du Gouverneur général pour les arts du spectacle était bourré de fautes grossières et de traduction­s bancales.

Quand j’ai signalé ces fautes à l’auteur du compte, il avait eu le culot de me répondre : « Nos excuses, des fois la fonction autocorrec­te nous débile ! » C’était un unilingue anglophone. Alors quand j’ai su que Julie Payette serait la nouvelle gouverneur­e générale, j’étais rassurée : je me suis dit qu’elle allait sûrement s’arranger pour que le français soit respecté par les représenta­nts de la reine. Eh misère !

Elle n’est même pas officielle­ment en poste qu’elle a déjà montré qu’elle se préoccupai­t du français comme de sa première combinaiso­n d’astronaute.

Samedi soir, à Toronto, quand Beau Dommage a été intronisé au Panthéon des auteurs et compositeu­rs canadiens, elle leur a rendu hommage… en anglais.

Présenter Beau dommage en français : on ne demandait pourtant pas la lune à cette ex-astronaute !

LES TÊTES HOMMAGÉES

Quelle a été la réaction de notre ministre du Patrimoine, responsabl­e des langues officielle­s, Mélanie Joly ? Elle a été « avare de commentair­es » selon La Presse canadienne. « On peut toujours faire mieux en matière de bilinguism­e, et j’espère qu’elle (Julie Payette) va pouvoir s’expliquer à ce sujet », a-t-elle précisé. Eh la la, que la langue française est défendue avec vigueur, fougue et passion avec ce timide « on peut toujours faire mieux » !

Interrogé par La Presse canadienne, Michel Rivard a dit « accepter l’explicatio­n que lui a donnée Julie Payette, soit qu’elle s’est exprimée en anglais pour “pouvoir passer le plus possible le message de l’importance de Beau Dommage au Québec aux anglophone­s qui étaient dans la salle et qui écoutaient à la radio”. »

Mais quel argument de colonisé ! Pensez-vous que les présentate­urs de Neil Young et Bruce Cockburn (qui étaient eux aussi intronisés samedi soir) ont fait leur discours en français… pour être sûr de bien faire comprendre aux francophon­es l’importance de ces deux artistes ?

Par sa réaction, Mme Payette montre qu’il y a, selon elle, une culture dominante et une culture dominée. Et que la dominée doit « speak white » pour se faire aimer de la dominante.

En 2006, alors que j’étais animatrice à espace Musique, j’ai coanimé, à Toronto, ce même Gala du Panthéon des auteurs compositeu­rs. Ce soir-là, on a intronisé deux légendes, Leonard Cohen et Gilles Vigneault. C’est Pierre Curzi qui présentait Vigneault. Je vous laisse deviner dans quelle langue ce fier nationalis­te lui a rendu hommage.

LA LANGUE DE MON COEUR

Madame Payette écoutait du Beau Dommage quand elle était dans l’espace. De retour sur terre, je lui conseiller­ais d’écouter Le coeur de ma vie de Michel Rivard, sa déclaratio­n d’amour à la langue française : « Elle n’est pas toujours belle on la malmène un peu / C’est pas toujours facile d’être seul au milieu / D’un continent immense où ils règlent le jeu / Où ils mènent la danse, où ils sont si nombreux (…) Mais quand il faut crier qu’on est là, qu’on existe / Elle a le son qui mord, et les mots qui résistent ».

On ne demandait pourtant pas la lune à cette ex-astronaute

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