Dynasties sanglantes
Five Kings revisite avec réussite le parcours de cinq rois shakespeariens
« La dent cruelle de la douleur n’est jamais plus venimeuse que lorsqu’elle mord sans déchirer la plaie. » - Richard II
L’entreprise était périlleuse et à risque. Olivier Keimed a réussi un tour de force en ramenant dans une seule histoire celles des rois Richard II, Henry IV, Henri V, Henri VI et Richard III, personnages phares de l’univers shakespearien.
À l’affiche au Trident jusqu’au 7 octobre, dans une mise en scène de Frédéric Dubois, Five Kings – L’histoire de notre chute s’inspire de deux tétralogies écrites par le mythique auteur anglais et se déroule entre 1965 et 2017.
Les pièges associés à ce genre d’adaptation étaient nombreux, mais le résultat est tout à fait fascinant. Ça fonctionne. Une des réussites de Five Kings est d’avoir réussi ce voyage dans le temps sans jamais dénaturer l’essence et l’esprit de l’oeuvre originale.
Les époques sont situées sur un écran géant et par l’habillement. Les références historiques et événementielles sont subtiles et font de la pièce un objet théâtral tout à fait intemporel. Et il n’est absolument pas nécessaire d’avoir réussi le cours Shakespeare 101 pour comprendre et s’y retrouver.
Les complots, conspirations, trahisons familiales, dénonciations, rebellions, revirements, l’obsession du pouvoir et bien sûr, de nombreux assassinats ponctuent Five Kings. Une oeuvre, qui, transposée dans la réalité d’aujourd’hui, démontre le talent de visionnaire de Shakespeare.
FRESQUE BRILLANTE
Lancée sous le règne de Richard Plantagenêt, en 1965, avec une mise en scène minimaliste, où sept comédiens s’avancent sur un plateau dénudé d’éléments de décor, la saga se termine en 2017, lorsque Richard York raconte son ascension vers le pouvoir à travers une téléréalité.
On constate, dans le premier segment, qu’il est possible d’être puissant uniquement par la force des mots et la façon de les déclamer.
La mise en scène évolue et se complexifie en avançant dans le temps. Le phrasé est moderne et l’équipe de comédiens, qui interprète différents rôles, excelle. Étienne Pilon, dans le rôle de Richard Plantagenêt, Olivier Coyette, dans celui d’henry Lancaster, Jean-michel Déry (Harry Lancaster), Jonathan Gagnon (Henry Lancaster Jr,) et Jack Robitaille (Falstaff) offrent de superbes performances d’acteurs.
La pièce, qui dure trois heures trente, avec un entracte, s’étire un peu en fin de parcours. La téléréalité mettant en vedette Patrice Dubois devient, par son procédé, un peu répétitive et redondante. C’est le seul petit reproche que l’on peut faire à cette brillante fresque.
Five Kings est présenté au Trident, du mardi au samedi, jusqu’au 7 octobre.