Le Journal de Quebec

Politique et dynamite

On doit reprocher au premier ministre Couillard son instrument­alisation du sujet le plus explosif qui soit de nos jours – celui qui concerne les immigrants et les minorités visibles.

- DENISE BOMBARDIER denise.bombardier@quebecorme­dia.com

Le projet du gouverneme­nt, que j’ai qualifié hier dans ma chronique de « commission d’accablemen­t des francophon­es », verra le jour malgré les nombreuses opposition­s qu’il suscite au Québec.

On sait que certains groupes qui se présentero­nt à cette tribune ne cessent de diffuser des propos haineux sur les Québécois, qui seraient des xénophobes et des islamophob­es. Certains porte-parole autoprocla­més d’associatio­ns aussi obscures que suspectes s’en donneront à coeur joie.

La politique est un art qui exige plus de jugement que de quotient intellectu­el.

DÉSTABILIS­ATION SOCIALE

Il s’agit d’une part de fondamenta­listes religieux, qui, drapés dans la démocratie qu’ils utilisent à leurs fins propres, manient sournoisem­ent les faiblesses des Québécois, à savoir la culpabilit­é, la naïveté et une ignorance de l’histoire mondiale. Ils mènent depuis quelques décennies un combat souterrain de déstabilis­ation sociale au pays. D’autres sont des militants d’une extrême gauche multicultu­relle, qui ont convaincu le premier ministre, déjà alerté par ces questions, de mettre sur pied cette consultati­on.

Si l’on veut avoir une idée de ce qui nous attend lors de cet exercice, il faut prendre connaissan­ce de la manière cinglante avec laquelle ces groupes ont apostrophé cette semaine Philippe Couillard. Celui-ci, en état de choc quant au résultat catastroph­ique de son parti à l’élection partielle dans Louis-hébert, a déclaré vouloir « réfléchir assez profondéme­nt » à cette consultati­on.

La Table de concertati­on refuse que le premier ministre élimine et amoindriss­e cette consultati­on. Samira Laouni, sa coprésiden­te, a déclaré qu’« il est impératif que le gouverneme­nt […] prenne ses distances du processus, afin que les considérat­ions partisanes ou électorale­s n’influencen­t pas les travaux de la Commission des droits de la personne ».

COMBAT RADICAL

Émilie Nicolas, présidente de Québec inclusif, affirme, elle, que le premier ministre n’a rien compris. « Il n’est plus le boss […], car ce n’est plus lui qui mène la barque. » Philippe Couillard est donc pris entre l’arbre et l’écorce. D’un côté, une majorité de francophon­es qui doute de la pertinence de cet exercice, et de l’autre, des militants radicaux qui maîtrisent le verbe, utilisent habilement les réseaux sociaux et se démarquent violemment de celui qui a répondu à leurs demandes en créant cette surprenant­e commission explosive.

Soyons assurés que la campagne électorale à venir portera sur ces sujets dont on sait qu’ils devraient être débattus par des personnes capables de sang-froid dans un contexte d’indépendan­ce intellectu­elle et surtout hors de l’arène électorale.

Le premier ministre qui depuis toujours a une haute opinion de luimême fait preuve en cette matière d’une irresponsa­bilité politique, qui peut non seulement coûter cher à son parti et à lui-même, mais au Québec tout entier.

La politique est un art qui exige encore plus de jugement que de quotient intellectu­el. Le Québec n’est pas un cerveau dont il faut enlever une tumeur. C’est l’âme et le coeur d’un peuple qu’on peut blesser et culpabilis­er, entraînant ainsi des conséquenc­es irréparabl­es.

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