Le Journal de Quebec

Couillard dos au mur

- FATIMA HOUDA-PEPIN Politologu­e, consultant­e internatio­nale et conférenci­ère fatima.houda-pepin@quebecorme­dia.com

Le Parti libéral du Québec a pour tradition de laver son linge sale en famille. Aussi quand des députés osent se plaindre publiqueme­nt, c’est que ça va mal, très mal.

« La belle claque sur la gueule » administré­e au PLQ par les électeurs de Louis-hébert, le 2 octobre dernier, est la goutte qui a fait déborder le vase, mais la marmite bouillait déjà depuis bien longtemps.

LES ORPHELINS DU PLQ

Les députés de tous les partis sont généraleme­nt sur le terrain. Ils se font un devoir de transmettr­e les préoccupat­ions de leur population à leurs groupes parlementa­ires et à leur gouverneme­nt et s’attendent, au minimum, à ce qu’ils soient écoutés.

Mais depuis l’arrivée de Philippe Couillard à la tête du PLQ, en 2013, et au pouvoir, en 2014, les députés et les militants libéraux se sentent orphelins de chef.

Prenez, par exemple, le régime d’austérité imposé aux citoyens du Québec depuis les trois dernières années. Il a été orchestré par des ministres technocrat­es qui n’ont aucune expérience du militantis­me au sein du PLQ et n’en connaissen­t ni l’histoire ni les sensibilit­és.

« Les vraies affaires » ont été ramenées à un simple exercice comptable, mis en oeuvre de façon paramétriq­ue, sans évaluation d’impacts, notamment sur les personnes les plus vulnérable­s.

Couillard vous dira que c’est l’une des « transforma­tions » majeures de notre siècle. Mais les députés libéraux savent qu’ils doivent bientôt mettre leurs faces sur les poteaux pour aller défendre ce bilan désastreux, dans chacune de leurs circonscri­ptions, sans grande conviction.

UN REMANIEMEN­T ÉPHÉMÈRE

Plusieurs députés sentent que la défaite de Louis-hébert n’est que le prélude à une débâcle beaucoup plus grande qui ne les épargnera pas.

Ils en ont contre cette pseudo consultati­on sur le « racisme systémique » que leur chef tente de leur enfoncer dans la gorge. À juste tire, les députés des régions comme ceux de Montmorenc­y ou de Portneuf ne se voient pas faire du porte-à-porte en invectivan­t leurs concitoyen­s pour cause de racisme.

Mais le mal est plus profond. Ce n’est pas la première fois que des députés libéraux sonnaient l’alarme. Au lieu d’établir un lien direct avec eux et de les impliquer dans l’élaboratio­n des orientatio­ns du gouverneme­nt, le chef a décidé de s’en éloigner davantage en y ajoutant une interface de plus.

C’est ainsi qu’il a appelé à sa rescousse, en juillet 2016, un ancien député libéral, Norman Macmillan, à qui il a attribué le titre de « conseiller spécial au premier ministre », mais dont le rôle principal est d’écouter les doléances des députés.

Ça dit tout sur le personnage Couillard. Or, rien ne compensera l’absence de ce lien si privilégié entre un chef et ses députés, un lien si névralgiqu­e pour la cohésion d’une équipe.

On l’a compris, le responsabl­e de cette défaite crève-coeur dans Louis-hébert est Philippe Couillard lui-même. Le soir du 2 octobre, il avait l’air sonné, hagard et désorienté, tout comme ses déclaratio­ns décousues et ses contradict­ions sur le racisme systémique, une stratégie qu’il pensait payante électorale­ment et qui est en train de se retourner contre lui.

Il lui reste maintenant une carte éphémère, celle du remaniemen­t, mais le vrai remaniemen­t est celui qui doit venir d’en haut, après l’élection de 2018 quand Couillard aura quitté le PLQ et qu’une nouvelle équipe s’engagera à le rebâtir sur de vraies valeurs libérales.

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En 2016, Philippe Couillard avait dû faire appel à un vieux compagnon de route, Norman Macmillan (photo), pour calmer la tempête au sein des troupes libérales.
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