Un pas de géant pour les victimes de fraude
Après l’avoir reporté à maintes reprises, le ministre des Finances, Carlos Leitao, a finalement déposé son projet de loi 141 visant à réformer l’encadrement du secteur financier québécois et à renforcer la protection des épargnants.
Et concernant l’indemnisation des victimes de fraude financière et de détournement de fonds, pas de doute que le projet de loi du ministre Leitao va régler un sacré gros problème.
Les victimes vont enfin bénéficier d’une meilleure protection de la part du Fonds d’indemnisation des services financiers (FISF), lequel fonds peut « théoriquement » les dédommager jusqu’à hauteur de 200 000 $ par fraude commise par des représentants (courtiers, cabinets, planificateurs) inscrits à l’autorité des marchés financiers (AMF).
J’insiste sur le mot « théoriquement », car en réalité peu de victimes y ont eu accès.
LE PROBLÈME
Actuellement, ce fonds d’indemnisation ne dédommage les victimes qu’à la condition d’avoir acquis le produit financier d’un représentant (courtier, planificateur, cabinet) dont la discipline l’autorise à vendre spécifiquement ledit produit.
Si le représentant fautif a vendu à sa victime un produit financier non couvert par sa discipline, la victime verra sa demande d’indemnisation se faire rejeter par le Fonds d’indemnisation. Et ce, même si le représentant en question est inscrit à l’autorité des marchés financiers.
C’est ce qui est arrivé dans le cadre du scandale Norbourg, en 2006, alors que neuf victimes sur 10 n’ont pu se faire dédommager par le FISF.
Pis encore. Le nombre de victimes de fraude financière n’ayant pu se faire dédommager par le FISF s’est par la suite grandement accru au fil des années.
À tel point d’ailleurs que dans un récent rapport, la vérificatrice générale du gouvernement du Québec, Guylaine Leclerc, a elle-même dénoncé le FISF en l’accusant de ne pas jouer « pleinement son rôle, soit d’indemniser les victimes de fraude ».
La vérificatrice soulignait que moins de 10 % des réclamations de victimes de fraude financière ont été acceptées lors des quatre dernières années.
Un vrai scandale, carrément attribuable à l’ineptie de l’appareil gouvernemental. Les épargnants victimes de fraude financière de la part de leurs représentants ont ainsi perdu des dizaines et des dizaines de millions de dollars en réclamations refusées par le Fonds d’indemnisation.
LA SOLUTION
Le projet de loi 141 vient corriger ce manque flagrant de protection des épargnants en permettant au Fonds d’indemnisation de couvrir dorénavant tout investisseur victime d’une fraude commise par un représentant inscrit à L’AMF, et ce, peu importe la nature du produit ou du service financier en cause, et peu importe si le représentant avait ou pas le droit de le vendre.
Lorsque la loi 141 sera adoptée, les cas de fraude à la Norbourg seront dorénavant admissibles à l’indemnisation prévue par le Fonds d’indemnisation.
Cela fait 15 ans que cette protection élargie du FISF est réclamée tant par les défenseurs des épargnants que par le conseil d’administration même du FISF.