Mordre à l’hameçon
Martin Perizzolo proposait, hier, son tout premier spectacle en solo
Martin Perizzolo lançait le bal hier, à la salle Albert-rousseau, d’un automne particulièrement chargé en lancement de spectacles d’humour. Saura-t-il frayer son chemin dans le bassin grouillant d’humoristes déterminés ? Malgré quelques défauts, on a vu hier tout son potentiel.
Vingt-deux ans après sa sortie de l’école nationale de l’humour, il présente Nous, une offrande bien de son époque qui ne s’éloigne pas trop de ce qu’on connaît déjà de lui.
Dans un décor d’aquarium au look plutôt inachevé où le poisson brodé dans son dos s’y reflète, Martin Perizzolo se livre pendant 90 minutes à un public qui l’a connu pour ses rôles d’imbécile attachant dans Les beaux malaises, L’gros show ou la publicité des Fromages d’ici.
Sans faire de jeu de mots, il fait mordre les spectateurs à l’hameçon d’une façon particulière. Il lance sa ligne tout doucement, détourne notre attention, nous titille un peu et voilà qu’on mord à une ligne tout à fait inattendue, bien loin de là où on croyait aller.
Il trompe les apparences, et c’est probablement la plus grande qualité de ce spectacle, où on pourrait lui reprocher le manque de tonus de son ton, de son débit, et son rythme inégal. On a mordu, mais plus rarement à gorge déployée.
Comme entrée en matière, Perizzolo met la carte sur table de sa personnalité complexe en racontant son « pétage de câble » lors de son expérience de survie à l’émission Expédition extrême. Il se montre assez cinglant envers la production, mais « qu’est-ce que je peux faire d’autre à part en rire », conclut-il.
UN PEU D’IMPROVISATION
Il est toujours risqué d’insérer un segment d’improvisation dans un spectacle d’humour. Mais hier soir, le numéro a bien fonctionné, puisque c’est à ce moment que le niveau de décibel a augmenté.
Puis, il nous fait nager à travers des réflexions qui nous prouvent à quel point il est un fin observateur, nous amenant sur des sujets aussi précis que les poches de chandails et l’excellent numéro sur le tri de la salade mesclun.
On n’a pu échapper à des blagues sur les nouvelles technologies, mais sa compréhension de celles-ci, son questionnement sur la recherche de mégapixels et l’absurdité d’avoir une télévision sans fil — « la dernière question qu’on veut se poser dans la vie, c’est où j’ai mis ma télé ? » — lui ont valu ses premiers applaudissements.
Il est revenu plus tard avec une réflexion sur l’utilisation du cellulaire, des émoticônes, Tinder et servi des gags intelligents sur les réseaux sociaux, la consommation, et le consentement. « Ce n’est pas un référendum, ce n’est pas 50 % plus un », a-t-il martelé.
Écrit avec la collaboration de Simon Cohen, les textes très bien construits et on a souvent puisé loin les métaphores. Au final, Martin Perizzolo joue brillamment avec la limite entre sa personnalité et les « rôles de tata » qu’il a incarnés.