Stratagème « bien rodé » à Laval
L’entrepreneur Tony Accurso aurait participé au partage des contrats, allègue la Couronne
Le système de corruption et de partage des contrats publics à Laval était « immense et bien rodé » avec des « enveloppes brunes » d’argent comptant, a fait valoir la Couronne hier au début du procès de Tony Accurso.
L’entrepreneur en construction de 66 ans fait face à cinq chefs d’accusation, dont corruption dans les affaires municipales, fraude de plus de 5000 $ envers la Ville de Laval et complot.
Entre 1996 et 2010, il aurait participé au stratagème impliquant notamment l’ex-maire Gilles Vaillancourt, l’ex-directeur général Claude Asselin et l’ex-directeur de l’ingénierie de la Ville Claude De Guise. « M. Accurso était un proche de l’âme dirigeante de ce système frauduleux, Gilles Vaillancourt. Plusieurs rencontres sont survenues entre les deux hommes », a soutenu Richard Rougeau, procureur de la Couronne.
ENVELOPPES BRUNES
Selon lui, grâce à la complicité de certains dirigeants lavallois, les entrepreneurs, dont M. Accurso, étaient en mesure de s’entendre à l’avance sur l’identité du gagnant des appels d’offres publics. « On élimine tout mécanisme de concurrence, faisant en sorte de tirer le prix des contrats vers le haut », a-t-il fait valoir devant les 12 membres du jury.
Le tout aurait été entretenu à coup de nombreux pots-de-vin. « Cette contribution, en argent comptant, dans des enveloppes brunes, à l’abri des regards […] était le prix à payer pour obtenir frauduleusement des contrats à l’abri de la concurrence », a déclaré Me Rougeau.
En tout, 37 personnes, dont Gilles Vaillancourt, avaient été arrêtées en mai 2013 à la suite d’une enquête de l’unité permanente anticorruption (UPAC).
Accurso, ex-propriétaire des firmes de construction Louisbourg et Simard-beaudry, est la dernière personne à être jugée dans cette affaire. Il a plaidé non coupable. Hier, vêtu d’un veston noir et assis dans la salle, il a écouté attentivement et calmement le déroulement des procédures.
CONVOQUÉS AU BUREAU
Le premier témoin de la Couronne, Gilles Théberge, a dit avoir commencé à participer au partage des contrats alors qu’il travaillait pour la firme Sintra, en 1997. L’homme de 71 ans a quitté cette entreprise en 2000, après qu’une bombe a explosé sous son véhicule stationné chez lui en pleine nuit.
Théberge a expliqué qu’à partir de 1997, c’est le directeur de l’ingénierie à la Ville de Laval, Claude De Guise, qui convoquait tour à tour les entrepreneurs dans son bureau pour leur annoncer le gagnant des contrats. Il n’a toutefois pas impliqué Accurso dans son récit.
Gilles Théberge a reconnu avoir lui-même remis une ristourne de 2 % de la valeur des contrats, en argent comptant, dans le bureau de l’ingénieur Marc Gendron, de Tecsult.