Le Journal de Quebec

Six jours plus tard

- JOSÉE LEGAULT Blogueuse au Journal Politologu­e, auteure, chroniqueu­se politique josee.legault@quebecorme­dia.com @joseelegau­lt

Depuis hier, l’« affaire » Guy Ouellette est passée du statut peu enviable de crise politique à celui d’un immense panier de crabes. La confiance déjà fragile des Québécois envers leurs institutio­ns en prend pour son rhume.

Les éléments troublants se multiplien­t. À commencer par le trop long silence de Philippe Couillard sur l’arrestatio­n sans motif connu de son député Guy Ouellette par l’unité permanente anticorrup­tion (UPAC).

Il aura fallu six jours au premier ministre pour sortir de son mutisme. Invitant hier L’UPAC à « entendre les inquiétude­s de la population », il qualifiait enfin cette arrestatio­n surréalist­e de situation « grave et exceptionn­elle ». Or, à moins de vivre dans une république bananière, la situation était déjà grave dès la semaine dernière.

De retour à l’assemblée nationale, le président Jacques Chagnon exhortait L’UPAC à accuser Guy Ouellette ou à s’excuser. Sinon, lançait-il, il y a un risque de « dérive totalitair­e ». Rien de moins.

QUE CRAINT-IL ?

Ces propos puissants et sentis, c’est M. Couillard qui aurait dû les prononcer dès la semaine dernière. En lieu et place, les questions fusent. Pourquoi L’UPAC a-t-elle arrêté un député ? Pourquoi M. Couillard a-t-il attendu aussi longtemps avant de lui demander des comptes ? Craignait-il d’incommoder le grand patron de L’UPAC, Robert Lafrenière ?

Pourquoi le gouverneme­nt Charest ne s’est-il pas assuré de soumettre L’UPAC à un mécanisme indépendan­t de reddition de comptes ? Pourquoi s’est-il arrogé le pouvoir d’en nommer le patron alors qu’il savait que le Parti libéral serait l’objet premier d’une enquête ? En cela, L’UPAC et son patron sont devenus des intouchabl­es.

Dans un discours prononcé à l’assemblée nationale, Guy Ouellette s’est dit « victime d’un coup monté » et il a appelé à la « vigilance » des Québécois face au pouvoir démesuré de L’UPAC et de son patron.

QUI CROIRE ?

Deux heures plus tard, Robert Lafrenière tenait enfin un point de presse confirmant qu’un véritable bras de fer l’oppose à Guy Ouellette. D’après ce qu’on en décode, ce dernier ferait l’objet d’une enquête pour coulage direct ou indirect de documents confidenti­els de l’enquête Mâchurer sur le PLQ. De son côté, Guy Ouellette clame son innocence.

Pour les citoyens, le spectacle est désolant. Pendant que le gouverneme­nt Couillard n’ose pas convoquer Robert Lafrenière en commission parlementa­ire, qui croire ? Guy Ouellette ou L’UPAC ?

Pour le député, les autres parlementa­ires et le Québec, c’est le pire des scénarios. Comment accepter que L’UPAC soit libre de laisser une situation aussi grave en suspens, peut-être même pendant des mois ? Et quel en sera l’impact sur la démocratie québécoise ?

Que s’est-il donc passé sous le long régime du Parti libéral pour que les fondements de notre démocratie soient aussi ébranlés ? À moins d’un an des élections, la question risque de hanter le gouverneme­nt jusque dans l’isoloir.

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L’UPAC et son patron, Robert Lafrenière, seraient-ils devenus des intouchabl­es ?

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