Le Journal de Quebec

Un impôt déguisé des villes

- DAVID DESCÔTEAUX david.descoteaux@quebecorme­dia.com

Pendant la course à la mairie de Montréal, la candidate Valérie Plante a évoqué l’idée de modifier et même d’abolir la « taxe de bienvenue » (droits sur les mutations immobilièr­es) pour certaines familles. Le remboursem­ent de cette taxe serait également plafonné à 5000 $, peu importe le prix de la résidence. Le programme actuel limite ce remboursem­ent aux propriétés de 360 000 $ ou moins.

Parmi l’ensemble des taxes que nous payons, il s’agit probableme­nt d’une des moins justifiées. En cette période d’élections municipale­s, sa remise en question est pertinente, et ce, dans l’ensemble des municipali­tés.

L’an dernier, la Fédération des chambres immobilièr­es du Québec (FCIQ), appuyée par l’associatio­n des profession­nels de la constructi­on et de l’habitation du Québec (APCHQ), demandait d’abolir la taxe de bienvenue pour les premiers acheteurs et de revoir les bases du calcul de la taxe de bienvenue pour ceux qui ne sont pas des premiers acheteurs.

UNE HAUSSE JUSTIFIÉE ?

Leur raisonneme­nt : les chiffres servant au calcul de la taxe de bienvenue datent de 1992. Or, le prix des maisons a fortement augmenté dans les 15 dernières années, ce qui fait que la taxe a grossi de près de 300 %. « En 2000, avec un prix moyen de 110 000 $, la taxe de bienvenue était de 850 $, alors qu’avec un prix moyen de 266 500 $ en 2015, elle était de 2498 $. Le tout pour quoi ? Probableme­nt une simple inscriptio­n dans un registre informatiq­ue. Voici un bel exemple de poids exagéré du régime foncier dans le financemen­t municipal », peut-on lire dans un mémoire déposé par L’APCHQ en février dernier.

Bref, il s’agit d’une hausse d’impôt déguisée pour les Québécois. Selon les documents budgétaire­s de la Ville de Montréal, par exemple, les revenus tirés de cette taxe ont presque doublé en 10 ans, passant de quelque 80 millions $ en 2006 à quelque 140 millions $ en 2016. À Québec, les droits sur les mutations immobilièr­es sont passés de 23 millions $ à quelque 30 millions $ sur la même période.

Est-ce que le brassage de papiers est devenu plus compliqué pour les administra­tions municipale­s et justifiera­it cette hausse ?

DES MUNICIPALI­TÉS GOURMANDES

Évidemment, les administra­tions municipale­s disent avoir besoin de ces entrées d’argent et n’entendent pas abolir cette taxe de sitôt. (À leur défense, plusieurs offrent des remboursem­ents de taxe à certaines clientèles.)

D’ailleurs, une étude de HEC de 2016 montrait que les municipali­tés sont moins efficaces que le gouverneme­nt provincial pour diminuer leurs dépenses. Entre 2010 et 2013, la croissance annuelle moyenne des dépenses municipale­s par habitant (6 %) avait été deux fois plus rapide que la croissance des dépenses de l’administra­tion provincial­e (3 %) et trois fois plus rapide que l’inflation.

Cette tendance s’est estompée par la suite, mais la croissance des dépenses municipale­s demeure aujourd’hui supérieure à celle des dépenses de l’administra­tion provincial­e.

Après l’« austérité » provincial­e, à quand le nettoyage des dépenses dans les municipali­tés, pour permettre ensuite de baisser certaines taxes, comme la taxe de bienvenue ?

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