Le Journal de Quebec

Le vote des enfants

- DENISE BOMBARDIER Blogueuse au Journal Journalist­e, écrivaine et auteure denise.bombardier @quebecorme­dia.com

Ceux qui ont eu la « brillante » idée d’organiser 19 petits bureaux de scrutin où des enfants ont voté hier à Montréal croient certaineme­nt contribuer au progrès de la démocratie.

Bien sûr, les enfants ne devaient pas choisir des candidats, mais plutôt répondre à une question sur la gouvernanc­e de Montréal. Quatre choix s’offraient à eux. 1. Des arénas, des centres sportifs, des piscines. 2. Des bibliothèq­ues, des centres de loisirs, des spectacles. 3. Des autobus, des métros, des trains (à noter que l’auto est exclue). 4. Des parcs, des modules de jeu, des espaces verts.

Ces idées, enrobées de bons sentiments, nous éclairent sur l’« insignifia­ntisation » de la politique. Et plus grave, ce désir d’enfermer les enfants dans le monde des adultes nous éclaire sur l’irresponsa­bilité des adultes face aux enfants dans notre société aux repères éclatés.

Faut-il rappeler que le premier droit de l’enfant est celui d’être un enfant ? Or les adultes d’aujourd’hui définissen­t les enfants en fonction de leurs propres désirs, de leurs contrainte­s et leurs faiblesses personnell­es. C’est nier le droit de l’enfant à vivre dans son univers, protégé par les adultes dont c’est le devoir de les mettre à l’abri des tensions sociales qui s’abattront sur eux bien assez vite.

ACCABLEMEN­T

Pourquoi accabler nos enfants en exigeant d’eux qu’ils expriment des choix politiques alors que le problème est plutôt le manque de jugement et de vision de ceux qui nous dirigent ? Les citoyens eux-mêmes sont dépassés par les événements et faute de s’informer ils n’arrivent pas à saisir les enjeux de l’avenir.

Et l’on voudrait que les enfants soient consultés ? La vie moderne s’accommode mal, hélas, de leurs besoins. Ils sont enrégiment­és dès le petit âge. À peine marchent-ils qu’ils doivent prendre le rang. On les voit dans nos rues, la main sur une corde avec leurs petits camarades, encadrés par des responsabl­es de garderie. Exposés sans trop de contrôle aux écrans de tous les excès, ils se font voler leur innocence, qui est de vivre dans leur imaginaire. Ils devraient découvrir la réalité à travers le filtre des adultes, au premier chef, papa et maman.

J’ai croisé des gens, emballés de toutes les niaiseries de l’air du temps, qui exprimaien­t leur ravissemen­t devant l’initiative « géniale » de faire voter les enfants. Sans surprise, ces personnes qui croient être à la fine pointe de la modernité actuelle trouvent que l’idée de faire voter les jeunes à 16 ans serait aussi une avancée dans le progrès post-moderne où l’apparence dé- classe le contenu.

PSEUDO-THÉORIES

Les enfants ne sont pas adaptables à toutes les réalités des adultes. Ces pseudo-théories sortent de la tête de personnes qui veulent se délester de leurs culpabilit­és. Lorsqu’on n’a pas le temps de s’occuper des enfants pour toutes les bonnes raisons du monde, on a tendance à les redéfinir comme des adultes miniatures.

Laissons les enfants jouer entre eux. Racontons-leur des histoires de bons et de méchants, mais grands dieux ! éloignons-les de nos propres délires politiques.

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Le premier droit d’un enfant, c’est d’être un enfant.

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