Le Journal de Quebec

OTTAWA CACHE DES DOCUMENTS SUR L’ÉVASION FISCALE EN SUISSE

Un organisme tente de faire la lumière sur des milliards cachés par des Canadiens BUREAU D’ENQUÊTE

- Jean-françois Cloutier l Jfcloutier­jdm

Le gouverneme­nt Trudeau se traîne les pieds pour éviter de devoir fournir des documents sur un dossier explosif d’évasion fiscale de plusieurs milliards de dollars par de riches Canadiens en Suisse, selon un organisme de défense des contribuab­les.

« Il y a clairement quelque chose dans le dossier qu’ils ne veulent pas nous donner pour une raison inexpliqué­e », affirme Michael Dagg, directeur de l’accès à l’informatio­n pour l’organisme Canadiens pour la responsabi­lité.

Alors qu’ottawa assure vouloir faire une priorité de la lutte à l’évasion fiscale offshore, l’organisme tente en vain, depuis trois ans, d’obtenir des documents liés au dossier d’enquête du fédéral sur la banque suisse UBS, en vertu de la loi d’accès à l’informatio­n.

Cet organisme a été fondé par le sonneur d’alarme très connu au Canada anglais Allan Cutler ( voir encadré).

M. Cutler cherche à comprendre pourquoi le Canada n’a jamais mis à l’amende ni accusé aucun contribuab­le canadien qui a caché de l’argent en Suisse dans les années 2000. « C’est absolument incompréhe­nsible », dit-il.

7 MILLIARDS $ CACHÉS

Notre Bureau d’enquête a d’ailleurs révélé, en septembre, que la banque suisse UBS avait recueilli, en 2004, près de 7 milliards $ canadiens dans un programme d’investisse­ment offshore secret.

Un sonneur d’alarme américain, Brad Birkenfeld, s’est vu remettre une somme de 104 M$ US par le fisc américain pour avoir révélé l’existence de ce même programme destiné aux personnes riches.

Birkenfeld a pourtant tenté, dès 2008, d’alerter Revenu Canada sur l’existence de ce programme. Mais contrairem­ent aux États-unis, le fisc canadien n’a jamais cherché à le rencontrer.

DEMANDES D’ACCÈS IGNORÉES

En 2015, Michael Dagg a envoyé une première demande d’accès pour obtenir la documentat­ion liée au dossier.

Le ministère de la Justice lui a alors répondu qu’« aucun document n’existait en réponse à votre demande ».

Dagg a porté plainte au Commissari­at à l’informatio­n du Canada. L’enquête est toujours active.

En 2016, Michael Dagg a envoyé une deuxième demande d’accès à l’informatio­n plus précise réclamant « toute informatio­n, enregistre­ment ou document » au sujet du dossier Birkenfeld.

DÉLAIS QUI S’ALLONGENT

En mars 2017, le fisc a cette fois demandé un prolongeme­nt de 180 jours pour fournir les renseignem­ents.

En septembre 2017, M. Dagg s’est cependant fait répondre que l’informatio­n ne pourrait pas être fournie, une fois de plus. Cette fois-ci, on argue que la permission accordée par Birkenfeld pour donner des renseignem­ents le concernant n’a pas été faite au bon nom.

« C’est une tactique pure et simple pour acheter du temps, dénonce Michael Dagg. Nous allons nous adresser aux tribunaux s’il le faut pour obtenir les documents. »

Jean-françois Cloutier est l’auteur du livre La grande dérive, publié en septembre aux Édition s du journal, sur l’utilisatio­n des paradis fiscaux par les riches Canadiens.

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PHOTOS D’ARCHIVES, Brad Birkenfeld est un sonneur d’alarme américain qui a tenté dès 2008 d’alerter le Canada sur l’existence d’un programme d’investisse­ment offshore secret en Suisse. Contrairem­ent aux États-unis, le fisc canadien n’a jamais cherché à le rencontrer.
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