Le Journal de Quebec

Déjà à bout de souffle, le « Trumpisme » ?

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J’en croise encore, toutes les semaines, des gens qui agitent la tête ou qui se tiennent la mâchoire qu’ils se sont décrochée il y a un an jour pour jour en apprenant que Donald Trump venait d’être élu président des États-unis. Un an plus tard, le même résultat se reproduira­it-il ?

On consacre rarement beaucoup d’attention aux élections locales américaine­s. Il faut dire que les Américains votent souvent et votent pour tout : de la présidence aux commission­s scolaires, des sénateurs à leurs shérifs et leurs juges, la démocratie américaine ne fait pas dans la demi-mesure.

Si la plupart de ces scrutins laissent froids (hormis la bataille pour la Maison-blanche, bien sûr), l’élection d’un nouveau gouverneur en Virginie a attiré cette fois-ci l’attention de tout le pays. C’est que la Virginie réussit à rester un État influent.

DE ROUGE À BLEU

Républicai­n, Barack Obama, en 2008, l’a placé dans le camp démocrate pour la première fois depuis Lyndon B. Johnson en 1964. Et c’est le seul État du sud qu’hillary Clinton est parvenue à remporter l’année dernière. Sauf que les républicai­ns persistent à garder espoir, parce que la Virginie est déchirée en deux.

Le nord de l’état, collé à la capitale fédérale, profite des emplois dans la fonction publique, des grands contrats militaires et des entreprise­s de haute technologi­e qui embauchent de jeunes profession­nels et paient bien.

À peu près tout le reste de la Virginie tire de la patte avec des régions rurales qui ont peu changé au cours des trente dernières années et des coins isolés où la crise de consommati­on des opiacés fait des ravages. Dans ces comtés-là, on les retrouve en quantité, ces « oubliés » qui ont fait la fortune de Donald Trump ailleurs au pays le 8 novembre 2016.

FANATISME ET INTOLÉRANC­E AU SECOURS

C’est cet électorat que le candidat républicai­n Ed Gillespie a tenté de réveiller. Sa campagne a dépensé une fortune à présenter son rival, le lieutenant-gouverneur de l’état, Ralph Northam, comme accommodan­t à l’égard des pédophiles et complaisan­t envers les membres de MS-13, un gang latino phénoménal­ement violent. Gillespie a aussi récupéré le débat sur les monuments en hommage aux soldats sudistes lors de la Guerre de Sécession (pas question qu’on y touche) et celui sur l’immigratio­n (non aux villes-sanctuaire­s, ces lieux où les immigrants illégaux peuvent vivre sans craindre d’être inquiétés par les policiers).

Des positions radicales pour un homme qui, en tant que président du Comité national républicai­n au milieu des années 2000, faisait plutôt la promotion d’un parti ouvert aux minorités.

PAS ASSEZ LOIN

La défaite de Gillespie et de sa campagne de peur va être décortiqué­e par tous les analystes politiques. Les 38 % d’opinion favorable que Donald Trump récoltait chez les électeurs probables (contre 59 % de désapproba­tion) n’ont certaineme­nt pas aidé le candidat républicai­n. En contrepart­ie, son associatio­n depuis des années avec l’establishm­ent républicai­n pourrait bien avoir repoussé les électeurs qui continuent de se méfier des politicien­s de carrière.

Trump, lui, a partagé son hypothèse, sur Twitter bien sûr.

« Ed Gillespie a travaillé dur, mais ne m’a pas suivi, ni ce que je représente. » C’est la leçon que le président veut qu’on retienne de cette élection : les Américains ne veulent ni nuance ni compromis. Il faut totalement s’abandonner à la fièvre du Trumpisme. Malade jusqu’au bout.

« Ed Gillespie a travaillé dur, mais ne m’a pas suivi, ni ce que je représente. »

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PHOTO AFP Le républicai­n Ed Gillespie a été battu hier, en Virginie.

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