Silence complet de la Banque du Canada sur les paradis fiscaux
Son patron estime que cette question est « pour quelqu’un d’autre »
En pleine crise des Paradise Papers, le numéro 1 de la Banque du Canada Stephen Poloz refuse de se prononcer sur les Canadiens qui ont recours aux paradis fiscaux pour éviter de payer de l’impôt, a-t-il dit hier.
« C’est une question loin de notre mandat et de notre expertise. C’est une question pour quelqu’un d’autre, mais pas pour nous », a répondu du tac au tac au Journal le gouverneur de la Banque du Canada, visiblement agacé par la question.
Alors que l’entourage même du premier ministre Justin Trudeau est montré du doigt pour des stratagèmes touchant des paradis fiscaux, le grand patron de la Banque du Canada, Stephen Poloz, ne voit pas l’intérêt de commenter ce dossier brûlant d’actualité.
« Je ne veux pas vous donner une opinion personnelle », a-t-il insisté, en marge d’une conférence du Conseil des relations internationales de Montréal.
Le rôle principal de la Banque du Canada est pourtant de « favoriser la prospérité économique et financière du Canada ». L’une de ses quatre responsabilités est de « promouvoir la fiabilité, la solidité et l’efficience des systèmes financiers au Canada et à l’échelle internationale ».
UNE SURPRISE
Pour Marwah Rizqy, professeure de fiscalité de l’université de Sherbrooke, spécialiste de la question des paradis fiscaux, la réaction du gouverneur de la Banque du Canada est incompréhensible.
« Je suis surprise. M. Poloz, comme toutes les personnes importantes au pays, devrait se poser plus de questions sur les paradis fiscaux. La Banque du Canada a intérêt à bien mieux saisir l’ampleur de l’argent qui quitte le pays… », a-t-elle affirmé.
BONNE POLITIQUE
Dans son allocution prononcée devant près de 1000 personnes au Palais des congrès, à Montréal, hier, M. Poloz a par ailleurs noté que la numérisation de l’économie jouait un certain rôle sur l’inflation. Selon lui, celle-ci a des répercussions sur la concurrence et la structure du marché.
« Pensons aux bouleversements engendrés par l’avènement d’entreprises comme Uber et Airbnb. Sans compter l’incidence du commerce électronique – ce qu’on appelle “l’effet Amazon” – qui se fait sûrement sentir sur le mode de fixation des prix », a-t-il laissé tomber.
M. Poloz a toutefois affirmé que l’effet Amazon ne lui semblait pas aussi grand que l’avènement des magasins à grande surface il y a 20 ans. Selon lui, ces nouvelles tendances ne sont pas encore assez importantes pour revoir le processus d’inflation répondant à la politique monétaire.
Le gouverneur de la Banque du Canada a enfin rappelé que le ciblage de l’inflation a bien fonctionné pendant plus de 25 ans.