Le Journal de Quebec

Jacques Rougeau lutte contre l’intimidati­on

Sa carrière de lutteur sur le circuit de la WWF a beau être loin derrière lui, Jacques Rougeau continue de mener ses propres combats.

- Pierre Durocher l Pdurocherj­dm

On a retrouvé le légendaire lutteur à l’école Saint-pierre, à Sainte-thérèse, sur la RiveNord de Montréal, où il livrait une conférence pour inciter les jeunes à prendre conscience de deux dangers particulie­rs qui les guettent, soit l’intimidati­on et le tabagisme.

Rougeau fait le tour des écoles de la province depuis 18 ans pour livrer des messages de persévéran­ce et de déterminat­ion.

« C’est ma façon de redonner à la société », explique le colosse de 57 ans, qui travaille sur un gros spectacle familial de lutte qui sera présenté le 18 août au Stade Uniprix à Montréal. « J’ai été chanceux dans la vie, et aujourd’hui je préfère donner plutôt que recevoir. Je ne suis pas riche, mais je suis millionnai­re dans mon coeur. »

PERSONNE N’EST À L’ABRI

Rougeau a été victime d’intimidati­on durant sa carrière de lutteur et ça ne s’était pas passé entre les câbles.

« Je souligne aux jeunes que personne n’est à l’abri. Je me suis fait sacrer une volée par les British Bulldogs en 1989, dans un vestiaire d’un aréna de Fort Lauderdale, parce que j’entendais dénoncer leur façon de se comporter en dehors du ring, relate-t-il. J’ai failli y laisser ma peau tellement ils m’ont tabassé solidement à coups de pied dans le visage.

Mon frère Raymond était blessé, se déplaçant en béquilles, et il ne pouvait pas venir à mon secours. J’en avais mangé toute une. J’ai eu la peur de ma vie. Ça ne m’a pas empêché de monter dans l’arène durant la soirée, malgré mes blessures à la tête. Pour ma sécurité, mon père était venu me chercher en voiture à l’aréna et j’ai passé trois jours sans être capable de parler tellement j’étais traumatisé. »

Rougeau n’a pas parlé publiqueme­nt de cette histoire pendant des années. « Ça ne se faisait pas à l’époque. Aujourd’hui, je recommande aux jeunes qui sont victimes d’intimidati­on à l’école de ne pas hésiter à le rapporter aux autorités, car si on n’agit pas rapidement, ça ne fait qu’empirer la situation. »

Comment réagissent les jeunes durant tes conférence­s ?

« Ils sont attentifs. Ils sont déjà conscients que l’intimidati­on, ça commence souvent à l’école. Quand un jeune intimide un élève, il n’a aucune idée des dommages que ça peut causer à long terme. Le fait de prononcer de telles conférence­s représente une sorte de thérapie pour moi, ayant été marqué au fer rouge par ce que j’ai vécu en 1989. Je visite une vingtaine d’écoles par année. Je fais ça bénévoleme­nt. Je parle avec mon coeur et j’amuse les enfants, surtout lorsqu’ils me voient appliquer des prises de lutte à l’un de leurs professeur­s ! »

Crois-tu avoir eu un impact sur la vie de certains jeunes qui sont victimes d’intimidati­on ?

« Oui. Ça m’est arrivé d’être contacté par des parents qui m’ont dit que ma conférence avait eu des effets positifs chez leur enfant. Je me souviens d’un père de famille qui m’avait appelé pour me remercier après avoir vu une vingtaine de jeunes se lever pour protéger sa fille en l’intégrant à leur groupe. Les intimidatr­ices n’avaient alors plus de rapport de force sur cette jeune fille, qui avait eu auparavant des idées suicidaire­s. Je ne sais pas combien de gens j’ai pu influencer, mais il suffit d’un seul cas pour justifier ce que je fais. »

Est-ce que tu parles toujours aux jeunes des dangers de la cigarette ?

« Oui, parce que des personnes très proches de moi sont décédées du cancer du poumon, notamment causé par la fumée secondaire. Les jeunes qui commencent à griller des cigarettes à l’école doivent être conscients des torts que ça cause. Il est important à mes yeux de faire la promotion d’un rythme de vie sain. »

Peux-tu nous parler du spectacle que tu prépares pour l’été prochain au Stade Uniprix et qui sera intitulé Le dernier chapitre ?

« J’aurai le plaisir de monter dans l’arène avec mes trois fils, JeanJacque­s, Cédric et Émile. On se mesurera à des élèves de mon école de lutte. Ce sera un spectacle sans violence. Il n’y aura pas d’échanges de coups de poing ni de coups de pied. Aucune boisson alcoolisée ne sera vendue sur le site. Ce sera un spectacle pour toute la famille axé sur la haute voltige et sur l’humour. Ça me dégoûte de voir ce que la lutte profession­nelle est devenue au fil des ans et j’aimerais en redorer l’image. Je dévoilerai tous les détails de ce

grand spectacle rassembleu­r dans le cadre d’une conférence de presse demain (lundi) au Stade Uniprix. Je fais ces spectacles depuis maintenant 15 ans à travers la province, mais celui du 18 août 2018 sera le plus gros de tous. C’est le projet d’une vie. »

As-tu toujours ton école de lutte à Montréal ?

« Oui, je donne des cours notamment à des enfants autistes, trisomique­s et dysphasiqu­es. Je les implique même dans mes spectacles depuis cinq ans. C’est bénéfique pour eux. Ils se sentent valorisés. »

Quelles sont tes autres occupation­s depuis que tu as pris ta retraite comme lutteur de la WWF?

« J’aime donner des spectacles humoristiq­ues dans de petites salles. Je raconte des anecdotes sur des faits survenus durant ma carrière de lutteur. Les gens aiment entendre mes récits, même si j’ai pris ma retraite il y a 20 ans sur le circuit mondial. J’ai vécu un tas de choses dans ma vie et j’aime partager mes expérience­s avec les gens. Je n’ai pas de difficulté à remplir les salles où je livre mes spectacles. »

Pourquoi as-tu cessé de regarder les galas de la WWE ?

« Parce que je trouve cela trop violent et trop axé sur le sexe. J’ai mis un terme à ma carrière à l’âge de 37 ans parce que je n’approuvais pas cette façon de faire la promotion de la lutte. Les lutteuses en étaient rendues à se déshabille­r dans le ring. Ça n’avait plus de sens. Je ne regarde plus les galas à la télévision depuis plusieurs années parce que ça ne transmet plus de bonnes valeurs. »

Quel a été le fait saillant de ta carrière ?

« J’ai été sacré champion du monde à quatre reprises, mais ma plus grande satisfacti­on a été ma victoire remportée aux dépens du géant Hulk Hogan, le 11 avril 1997 au Centre Molson. J’ai triomphé ce soir-là d’une légende. Il y a seulement trois hommes qui ont battu Hogan, soit le géant Ferré, The Ultimate Warrior et moi. Oui, les combats étaient arrangés, mais le fait que Hogan ait accepté que je le batte m’a procuré notoriété et respect. J’ai connu de belles années sur le circuit de la WWF au Canada et aux États-unis, notamment lorsque je personnifi­ais une police montée (The Mountie) et quand je faisais équipe avec mon frère Raymond (The Fabulous Rougeau Brothers) au début de ma carrière, de même qu’avec Pierre-carl Ouellet (The Quebecers and The Amazing French Canadians) par la suite. J’étais fier de voir des poupées à mon effigie vendues dans les magasins de jouets à travers le monde. La lutte ne m’a pas rendu riche, mais j’ai eu beaucoup de plaisir à offrir de bons spectacles au public. »

Le nom des Rougeau est-il toujours aussi populaire et connu au Québec ?

« Bien sûr. L’histoire de la famille Rougeau, c’est quatre génération­s de lutteurs. Les gens sont impression­nés lorsqu’ils voient mon fils Cédric, un géant de six pieds et sept pouces, pesant 325 livres, au physique comme s’il avait été taillé dans le roc. Mon père Jacques vit toujours. Il a 87 ans et il m’a toujours servi d’inspiratio­n. Il a déjà lutté avec ses trois fils et je veux maintenant vivre la même chose avec mes enfants. J’ai 57 ans, mais je me garde en forme. J’ai le physique d’un homme de 35 ans… avec un coeur d’enfant! »

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PHOTOS MARTIN CHEVALIER ET D’ARCHIVES 1. Jacques Rougeau est un colosse au coeur tendre. Il adore rencontrer les élèves dans les écoles de la province pour leur parler des dangers de l’intimidati­on et de la cigarette. 2. Les conférence­s que livre Jacques Rougeau ne manquent pas de capter...
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