Le Journal de Quebec

Interdit aux bien-pensants

- LISE RAVARY Blogueuse au Journal Communicat­rice, journalist­e et chroniqueu­se lise.ravary@quebecorme­dia.com @liseravary

D’une façon, Guy Nantel me fait penser à Mordecai Richler, l’auteur montréalai­s dont les propos sur les Québécois n’ont pas fait que des vagues, mais suscité des tsunamis d’indignatio­n et de colère.

Je m’explique : Richler malmenait les Québécois au-delà de l’acceptable pour la majorité. Mais quiconque connaît son oeuvre sait qu’il était encore plus impitoyabl­e avec les Juifs, sa propre tribu.

Dans ses spectacles, Guy Nantel malmène les juifs, les musulmans, les prêtres catholique­s pédophiles. Cela ne fait pas l’affaire de tout le monde : la preuve, Nantel reçoit plus que sa part de menaces et de messages haineux. Même ses collègues humoristes s’éreintent à prétendre qu’il n’existe pas.

Par contre, ayant assisté à son spectacle Nos droits et libertés vendredi, je confirme que le traitement qu’il réserve aux Québécois est plus proche du traitement de canal que du traitement de faveur. Il est très dur avec sa tribu. Comme Richler.

BANDE DE MOUS

« Lavettes, moutons, suiveux, mous » et j’en passe, Nantel, un souveraini­ste qui s’assume, n’a pas assez de mots — malgré son vocabulair­e bien fourni — pour dire tout le mal qu’il pense des Québécois qui refusent de s’assumer en tant que peuple, en tant que nation souveraine.

Ce fut mon malaise de la soirée, même si j’ai ri, car il frappe dans le mille en ce qui touche nos travers. Mais je n’ai jamais compris pourquoi autant de souveraini­stes préfèrent injurier les Québécois qui ne pensent pas comme eux au lieu d’essayer de les séduire. Mais bon, Nantel fait de l’humour, pas de la politique, même s’il est le plus politique des humoristes québécois.

Je suis tombée vendredi soir sur une critique du spectacle à Radio-canada. (Dois-je préciser que la journalist­e ne l’a pas aimé ?) Elle compare Nantel à Richard Martineau — une insulte pour elle, un compliment selon moi —, l’accuse de minimiser les dénonciati­ons des femmes, d’inventer des statistiqu­es (c’est un show d’humour, pas un reportage de L’actualité), de faire des procès d’intention et même, crime suprême, de donner son opinion ! Noooon, Des- champs et les Cyniques ne donnaient jamais leur opinion, eux.

Mardi, soir de première, il ne l’a fait rire que 14 fois. Vendredi soir, tout le monde a ri à gorge déployée pendant une heure et 45 minutes, sans entracte. Toute une performanc­e de stand-up.

MEILLEURES JOKES DE JUIFS

Je vais rarement voir des spectacles d’humour. Je ne suis pas un bon public pour l’humour « passe-moi le beurre » à moins d’ajouter les mots « Le dernier tango à Paris ». J’aime rire hard, à l’américaine. En fait, Nantel me rappelle feu George Carlin qui malmenait la religion et les obsessions de son époque avec la passion d’un pitbull pour son os.

J’aurais néanmoins une petite critique à faire sur ses jokes de juifs. L’argent, les affaires, Israël, c’est usé. Et ça n’a rien à voir avec la religion. Il pourrait plutôt ridiculise­r ces ultraortho­doxes qui font une longue prière après pipi-caca pour remercier Dieu de leur avoir donné assez de « trous et d’orifices » pour survivre à l’accumulati­on de déchets corporels.

Imaginez le potentiel humoristiq­ue de cette informatio­n !

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