Le Journal de Quebec

Le « fils d’ouvrier » devenu avocat

Né dans Limoilou, André Gaulin est membre du Barreau depuis 50 ans

- Kathleen Frenette l Kfrenettej­dq

En 1967, André Gaulin, fils d’ouvrier né dans le quartier Limoilou s’apprête à franchir une étape importante : celle de devenir avocat. Cinquante ans plus tard, du haut de ses 76 ans, Me Gaulin arpente encore les corridors du palais de justice de Québec.

C’est dans la salle des assises du vieux palais de justice, aujourd’hui le ministère des Finances, que Me Gaulin a accepté de s’ouvrir sur ses 50 années de pratique et sur ce qui l’a mené sur le chemin du droit.

Au milieu des années 1960, il s’usait déjà les fesses sur les bancs de bois de l’imposant édifice, passionné par la cause de Léopold Dion, surnommé le Monstre de Pont-rouge.

Après avoir « exploré » les relations industriel­les pendant un an, l’homme de loi a raconté « que ce n’était pas sa tasse de thé ».

« J’ai donc choisi d’aller prendre un café en droit », a laissé tomber l’homme qui n’a rien perdu de son sens de l’humour et de sa verve, très bien reflétée dans son regard franc, pétillant.

D’une anecdote à l’autre, Me Gaulin a parlé de ses débuts, pas toujours évidents dans un monde où les médecins étaient fils de médecins, les avocats, fils d’avocats.

« C’était la Révolution tranquille… Mon premier jour à l’université, le professeur de droit romain nous parlait des fils de famille… Alors je me suis levé, et je lui ai demandé de m’expliquer ce qu’était un fils de famille parce que moi, je savais que j’étais un fils d’ouvrier… et les “fils de famille” de ma classe se sont levés pour me faire un standing ovation », a-t-il raconté, fier d’avoir su faire sa place en restant lui-même et d’avoir pu accéder à ces rangs autrefois chasse gardée.

DE COURONNE À DÉFENSE

D’abord procureur de la Couronne, Me Gaulin a vu son nom être associé à plus d’une reprise à de célèbres causes qui faisaient la manchette.

« À un point où, quand je n’étais pas dans les journaux, mon père m’appelait pour me demander si j’étais en vacances ! » a-t-il dit, sourire aux lèvres.

Puis, un jour, après huit ans « de Cou- ronne », il a pris le chemin de la défense. Depuis les 42 dernières années, il a fait du droit sa vie, du Code criminel son livre de chevet.

« Vous savez, entre un avocat de défense et un procureur de la Couronne, il n’y a que trois lettres de différence : coupable ou non coupable… Au final, il ne faut pas oublier que c’est l’individu qu’il faut condamner et non pas le crime, et ça, je trouve que ça se perd avec les années… », a-t-il ajouté.

MÉDAILLE DU BARREAU

Le 8 septembre dernier, Me Gaulin a reçu la médaille du Conseil du Barreau de Québec pour souligner ses 50 années de pratique. Si cette distinctio­n l’a honoré, c’est surtout le respect que lui vouent les membres de sa confrérie, depuis ses tout débuts, qui lui font encore plus chaud au coeur.

Quelque temps avant cette remise, un jeune confrère lui a d’ailleurs écrit pour le féliciter et surtout le remercier de lui avoir fait comprendre que, contrairem­ent à ce que bien des gens pouvaient penser, « le bon sens et le droit n’étaient pas nécessaire­ment incompatib­les ».

Et si c’était à refaire, Me Gaulin reprendrai­t-il le même chemin, referait-il les mêmes choix ?

« Je pense que si ma vie était à recommence­r… je ferais un bon agriculteu­r ! » a-t-il conclu en affichant le visage de celui qui ne regrette rien.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES ?? Me André Gaulin, photograph­ié dans l’ancien palais de justice, aujourd’hui le ministère des Finances, dans le Vieux-québec. À 76 ans, il est membre du Barreau depuis 1967.
PHOTO D’ARCHIVES Me André Gaulin, photograph­ié dans l’ancien palais de justice, aujourd’hui le ministère des Finances, dans le Vieux-québec. À 76 ans, il est membre du Barreau depuis 1967.
 ?? PHOTO D’ARCHIVES ?? Sur cette image, on voit Me Gaulin, plus tôt dans sa carrière, étudier une décision qu’il a gagnée et qui vient d’être tranchée par la Cour suprême.
PHOTO D’ARCHIVES Sur cette image, on voit Me Gaulin, plus tôt dans sa carrière, étudier une décision qu’il a gagnée et qui vient d’être tranchée par la Cour suprême.
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