Un héros de l’indépendance devenu despote
HARARE | (AFP) Par défi, il avait un jour promis de fêter ses 100 ans au pouvoir. Le président du Zimbabwe Robert Mugabe devrait être poussé vers la sortie à seulement 93 ans, incarnation jusqu’à la caricature du despote africain prêt à tout pour perpétuer son règne.
Accueilli en 1980 en héros de l’indépendance loué par l’occident, le plus vieux chef d’état en exercice de la planète a été placé hier en détention par l’armée, après plus de 37 ans d’un pouvoir sans partage qui a ruiné son pays.
Lorsqu’il a pris les rênes de l’ex-rhodésie dirigée par la minorité blanche, Robert Mugabe a séduit. Sa politique de réconciliation, au nom de l’unité du pays, lui vaut des louanges générales, particulièrement dans les capitales étrangères. « Vous étiez mes ennemis hier, vous êtes maintenant mes amis », lance l’ex-chef de la guérilla.
Il offre des postes ministériels clés à des Blancs et autorise même leur chef, Ian Smith, à rester au pays.
En 10 ans, le pays progresse à pas de géant : construction d’écoles, de centres de santé et de nouveaux logements pour la majorité noire.
LOURDE OPPOSITION
Très tôt pourtant, le héros a la main lourde contre ses opposants.
Dès 1982, il envoie l’armée dans la province « dissidente » du Matabeleland (sud-ouest), terre des Ndebele et de son ancien allié pendant la guerre, Joshua Nkomo. La répression, brutale, fait environ 20 000 morts.
Mais le monde ferme les yeux. Il faudra attendre les années 2000, ses abus contre l’opposition, des fraudes électorales et surtout sa violente réforme agraire pour que l’idylle s’achève.
Dans des diatribes anti-impérialistes au vitriol, Robert Mugabe rend l’occident responsable de tous les maux de son pays, notamment sa ruine financière, et rejette toutes les accusations de dérive autoritaire.
SANTÉ FRAGILE ?
« Mugabe s’est maintenu au pouvoir en (...) écrasant ses opposants, violant la justice, piétinant le droit à la propriété, réprimant la presse indépendante et truquant les élections », estime Martin Meredith, un de ses biographes.
Depuis 2013, des rumeurs font rage sur l’état de santé du despote, considéré comme fragile en raison d’un présumé cancer.