Début d’une « nouvelle démocratie » au Zimbabwe
L’ex-vice-président déchu, Emmerson Mnangagwa, doit prendre officiellement les rênes du pays demain
HARARE | (AFP) Le nouvel homme fort du Zimbabwe, Emmerson Mnangagwa, a salué hier le début d’une « nouvelle démocratie » dans son pays au lendemain de la démission historique du président Robert Mugabe, dont il s’apprête à prendre la délicate succession.
Quelques heures après son retour d’un bref exil sud-africain, M. Mnangagwa a réservé son premier discours public de futur président à quelques centaines de partisans enthousiastes réunis devant le siège du parti au pouvoir, la Zanu-pf.
« Aujourd’hui, nous sommes les témoins du début d’une nouvelle démocratie », a-t-il lancé, avant d’appeler « tous les patriotes du Zimbabwe […] à travailler ensemble ».
Selon le scénario écrit par la Zanu-pf, l’ex-vice-président déchu doit prendre officiellement les rênes du pays demain, d’après le président de l’assemblée
LE « CROCODILE »
Âgé de 75 ans, le « crocodile », ainsi qu’il est surnommé pour son caractère inflexible, tient sa revanche.
Fidèle de l’ancien président et de son régime, ce héros de la guerre d’indépendance, plusieurs fois ministre, avait été sèchement remercié le 6 novembre dernier, sur injonction de la première dame Grace Mugabe à qui il barrait la route de la succession de son nonagénaire de mari.
Il avait alors quitté le pays pour des raisons de sécurité.
Son éviction a provoqué dans la nuit du 14 au 15 novembre un coup de force de l’armée, catégoriquement opposée à l’arrivée au pouvoir de l’incontrôlable Grace.
RELANCER L’ÉCONOMIE
Après avoir résisté plusieurs jours, Robert Mugabe a finalement rendu les armes mardi, alors qu’il était sous la menace d’une procédure de destitution.
« Ma décision de démissionner est volontaire. Elle est motivée par ma préoccupation pour le bien-être du peuple du Zimbabwe et mon souhait de permettre une transition en douceur, pacifique et non violente », a écrit M. Mugabe dans sa lettre de démission.
Quelques heures après les manifestations euphoriques qui ont salué son départ, la popula- tion restait pleine d’espoir.
« Ce que je désire ardemment, c’est que le camarade Mnangagwa, notre père, crée des emplois », a souhaité Munyaradzi Zovemhunu, 34 ans, contraint de vendre des fleurs pour vivre.
Robert Mugabe a laissé derrière lui une économie en piteux état, détruite par ses réformes dévastatrices. L’activité y tourne au ralenti, l’argent manque, le chômage frappe 90 % de la population et le spectre de l’hyperinflation rôde.
« PAS TRÈS PROPRE »
« Le départ de Robert Mugabe est un soulagement, mais il ne faut pas trop s’emballer pour le nouveau », a averti Patrick Moyo, un banquier de 38 ans : « N’oublions pas qu’il n’est pas très propre. »
Pilier de l’appareil sécuritaire zimbabwéen depuis quatre décennies, M. Mnangagwa s’est signalé comme le fidèle exécuteur des basses besognes de Robert Mugabe. « Des dizaines de milliers de personnes ont été torturées, ont disparu ou ont été tuées » sous l’ère Mugabe, a insisté Amnistie internationale, appelant le pays à « renoncer aux abus du passé ».