Le Journal de Quebec

Parfois, le processus est plus important que le résultat

- MANON MASSÉ

La question à se poser n’est peutêtre pas de savoir si nous devons être pour ou contre la légalisati­on du cannabis, mais plutôt de savoir pourquoi on légalise.

Pour plusieurs, surtout les jeunes, le fait que ça devienne légal équivaut à dire que ce n’est pas dangereux, pas problémati­que. Pourtant, l’usage du cannabis comporte des risques importants pour la santé, particuliè­rement chez les personnes qui en consomment fréquemmen­t ou qui commencent à le faire à un jeune âge.

PLUS ÉLEVÉ CHEZ LES JEUNES

Nous savons qu’au Canada, en 2015, 29,7 % des jeunes de 15 à 24 ans avaient consommé dans les 12 derniers mois. À Québec, en 2014, ça s’élevait à 38,4 %.

Nous savons également que 22,9 % des jeunes au secondaire ont consommé en 2013. De ce nombre, 8 % ont révélé avoir une consommati­on élevée de cannabis. De plus, la proportion des élèves ayant eu une consommati­on « élevée » de cannabis augmente avec le niveau scolaire pour atteindre 16 % en cinquième secondaire.

Sachant cela, on peut déduire que les 16-25 ans sont les jeunes ayant la plus forte consommati­on de cannabis parmi la population, puisqu’elle tend à baisser drastiquem­ent dans la deuxième moitié de la vingtaine. Cette problémati­que existe donc déjà chez nos jeunes, arrêtons de faire comme si cette réalité n’était pas existante.

On légalise le cannabis parce que c’est dangereux et problémati­que, et que nous devons nous en occuper.

SOUTIEN NÉCESSAIRE

Est-ce que cela va soulager la préoccupat­ion qu’on peut avoir face aux substances vendues dans la rue pour les moins de 18 ans ? Je ne crois pas.

C’est pourquoi il est indispensa­ble que notre gouverneme­nt s’assure, avant que cette loi entre en vigueur, que les organismes de prévention des toxicomani­es reçoivent le soutien financier nécessaire pour faire face aux demandes d’aide. Qu’ils puissent déployer leurs programmes de prévention afin de réduire les impacts négatifs de cette loi préparée à la va-vite.

À ce jour, aucun investisse­ment supplément­aire en prévention n’a été offert aux organismes. Il faut pourtant soutenir les groupes comme Uniatox qui accompagne­nt les jeunes et leur famille depuis plus de 40 ans. Il s’agit d’intervenan­ts enracinés dans leur communauté, qui possèdent une expertise reconnue et du personnel spécialisé.

Je ne vous cacherai pas nos craintes que, par manque de connaissan­ce des organismes locaux, le gouverneme­nt soit influencé par le lobby de certaines fondations ou organisati­ons. D’où l’importance de travailler d’abord avec la structure de santé publique de chaque région.

INQUIÉTUDE­S NORMALES

J’ai parfois le sentiment que nous mettons beaucoup d’énergie sur le résultat attendu, soit l’adoption d’un projet de loi, et peu sur le processus, à savoir de réfléchir aux objectifs recherchés par cette politique. Il ne faut pas se surprendre que la population s’inquiète.

Uniatox est un organisme à but non lucratif qui existe depuis 1978. Nous avons justement pour mandat la prévention des toxicomani­es, le repérage, la détection et l’interventi­on précoce, la réinsertio­n sociale et la prévention de la rechute.

Parce que nous sommes celles et ceux qui soutiennen­t les personnes ou les groupes désireux de comprendre ce qu’est la toxicomani­e et d’en prévenir le développem­ent, le gouverneme­nt doit nous impliquer dans ce processus de légalisati­on.

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