Les mafias continuent de gagner du terrain en Italie
La loi antimafia ne semble pas nuire à la puissance des organisations criminelles
MILAN | (AFP) Une semaine après la mort de Toto Riina, parrain historique de Cosa Nostra, l’italie a dressé à Milan un état des lieux préoccupant de la force de ses mafias, qui gangrènent le Sud, se développent encore dans le Nord et visent désormais le monde virtuel.
« La mafia n’a pas gagné, mais elle n’a pas non plus perdu », a déclaré le ministre italien de la Justice, Andrea Orlando, en ouverture des « États généraux de la lutte contre les mafias », qui viennent conclure une année de recherches et de réflexions ayant impliqué plus de 220 experts.
« Nous sommes dotés depuis longtemps de la législation antimafia la plus avancée (...), nous menons une action incessante depuis 25 ans. Comment est-il possible que les mafias soient encore puissantes ? » s’est interrogé Franco Roberti, qui était procureur national antimafia jusqu’à la semaine dernière.
En effet, des milliers de mafieux sont en prison, le total du patrimoine placé sous séquestre ou confisqué depuis plus de 20 ans est évalué à 30 milliards d’euros (45,5 G$), mais la ‘Ndrangheta (Calabre), la Camorra (Naples), la Cosa Nostra (Sicile) ou encore la Sacra Corona Unita (Pouilles) continuent de prospérer et même de se développer, en Italie et à l’étranger.
HONNÊTES ET RESPECTABLES
« Elles multiplient l’argent dans des proportions incroyables et cet argent finit par entrer dans notre économie, par se transformer en entreprises, en activités économiques souvent gérées par des personnes honnêtes et respectables », a expliqué Federico Cafiero De Raho, qui a pris la succession de M. Roberti.
La province de Milan est désormais la troisième en nombre de biens saisis à la mafia, après celles de Palerme et de Naples, et « il est plausible que, dans quelques années, la Lombardie (région de Milan) et le Latium (région de Rome) dépasseront la Calabre et les Pouilles pour arriver aux niveaux (d’infiltrations mafieuses) de la Sicile et de la Campanie (région de Naples) », selon le rapport de l’un des groupes de travail.
Outre le trafic de drogues à grande échelle, les mafias sont présentes dans la grande distribution, la restauration, la construction, l’ensemble de la filière agroalimentaire, le sport, le trafic des migrants, la gestion des déchets...
BITCOINS
Elles sont passées des pizzini, ces ordres transmis par les boss via des messages codés sur des petits bouts de papier, aux attachés-cases. Et des liasses de billets enterrés dans des bidons de lait aux bitcoins.
« Le cyberespace si prégnant dans notre vie quotidienne n’a pas de système de régulation ou de contrôle, et on y voit déjà des formes de criminalité très sophistiquées », a prévenu Alessandro Pansa, ancien chef de la police italienne.