Des dossiers médicaux de séropositifs aux poubelles
Un organisme jette des documents non déchiquetés
Des centaines de documents contenant des renseignements personnels, dont des informations médicales et des numéros d’assurance sociale, ont simplement été laissés à la rue par un organisme d’aide aux personnes séropositives qui venait de fermer ses portes.
« Je ne comprends pas comment ça se fait que vous m’appeliez. Comment avezvous eu mon numéro ? » s’exclame Michel Boucher.
Le numéro de téléphone, l’adresse et le dossier médical de ce Montréalais qui vit avec le VIH depuis plus de 30 ans figuraient dans une pile de documents abandonnés dans une poubelle ouverte, rue Panet, au centre-ville de Montréal, et donc, accessibles aux passants.
À LA VUE DE TOUS
« Je tombe des nues. Ils n’auraient jamais dû laisser ça comme ça dans la rue. Ils auraient dû les détruire, c’était la chose à faire », estime M. Boucher, qui a accepté d’être nommé puisqu’il dit assumer sa condition.
Il explique avoir fait appel à la Fondation d’aide directe SIDA Montréal (FADSM) en 1996 afin de recevoir de l’aide alimentaire. La liste des produits reçus à l’époque figure d’ailleurs dans les dossiers abandonnés et récupérés par Le Journal après qu’il fut alerté par un citoyen inquiet.
Un autre ancien bénéficiaire de l’organisme, qui préfère ne pas être identifié puisqu’il est séropositif, a confirmé qu’il a bel et bien fait appel à l’organisme vers la fin des années 1990. Lorsqu’on lui a indiqué que son dossier traînait à la rue, il s’est dit estomaqué d’apprendre que des informations sur son état de santé et son numéro de téléphone ont pu être laissées à la vue de tous.
Près de 2000 personnes touchées par le VIH auraient obtenu de l’aide auprès de l’organisme lors de son ouverture en 1991, selon un article du magazine Fugues.
Tout semble indiquer que plusieurs bacs et sacs de paperasse contenant des informations très sensibles ont été jetés négligemment après que l’organisme eut mis la clé sous la porte en août dernier.
« ERREUR HUMAINE »
Les documents auraient été déposés dans des poubelles en bordure d’un parc de l’autre côté de la rue où étaient situés les locaux de l’organisme, selon un résident de l’arrondissement de Ville-marie qui en a récupéré une partie.
Outre des dossiers d’usagers et des photos de bénéficiaires, on y retrouve des numéros d’assurance sociale (NAS) d’employés et des listes de donateurs.
La FASDM a officiellement fermé les livres le 31 août après plus de 25 années d’existence. Au moment de vider des classeurs, un employé aurait omis de détruire des documents très intimes, admet l’ex-directeur général de l’organisme, Claude Langlois.
« Ils se sont retrouvés là par erreur, c’est une erreur humaine », explique-t-il ajoutant que le nombre d’employés dont les informations personnelles auraient pu être compromises est limité. Selon le registre des entreprises, la FADSM employait entre un et cinq personnes par année.
M. Langlois soutient que les documents jetés sont peu nombreux, mais avoue ne pas savoir combien d’entre eux pourraient avoir été laissés tels quels dans la rue.