Le Journal de Quebec

Un produit naturel parfois mortel

Le kratom, qui a fait au moins 36 morts aux États-unis, est facile à se procurer au Canada même s’il est interdit

- Frédérique Giguère l Fgiguerejd­m frederique.giguere@quebecorme­dia.com

Les autorités canadienne­s mettent en garde les consommate­urs contre le kratom, un produit naturel dont les effets s’apparenten­t aux opioïdes et qui gagne en popularité aux États-unis, où le produit a fait au moins 36 morts.

Communémen­t vendu sous forme de poudre ou en gélules, le kratom se consomme souvent en thé. Pour 50 $, on peut se procurer un sac de 100 grammes.

En petite dose, les effets sont semblables à des drogues stimulante­s. Or, consommé en grande quantité, le kratom s’apparente à l’héroïne, à la morphine ou même au fentanyl.

« S’il est consommé avec d’autres dépresseur­s, comme l’alcool, les effets peuvent être un arrêt cardioresp­iratoire et un décès », a précisé le pharmacien-toxicologu­e à l’institut national de santé publique du Québec (INSPQ) Pierre-andré Dubé.

Bien qu’il ne soit pas autorisé par Santé Canada, le kratom se trouve très facilement sur internet. Les vendeurs tentent de se décharger de toutes responsabi­lités en inscrivant sur leur site que la substance n’est pas destinée à la consommati­on humaine. Par contre, selon Santé Canada, la vente, peu importe à qui elle s’adresse, est interdite.

FACILE À OBTENIR

Le Journal a trouvé au moins deux vendeurs basés au Québec, soit Kratom Montréal et Madam Kratom, simplement en tapant le nom du produit dans Google.

Dans le cas du premier, nous avons pu rejoindre le livreur, un certain Rick, qui était avare de commentair­es. Quelques heures après notre premier appel, la page Facebook et le site web de Kratom Montréal ont été fermés. Contacté une deuxième fois, le livreur a indiqué que le propriétai­re avait déjà l’intention de fer- mer « la compagnie », puisqu’il n’avait plus le temps de s’en occuper et que l’intérêt médiatique n’avait que pressé les choses.

Quant au deuxième vendeur, le seul enregistré au registre des entreprise­s, la gérante de l’endroit n’était pas non plus à l’aise de répondre aux questions. Le propriétai­re ne nous a jamais rappelés. Madam Kratom faisait déjà l’objet d’une enquête à la suite d’une plainte reçue, a indiqué Santé Canada.

NOMBREUX DÉCÈS

Aux États-unis, la Food and Drug Administra­tion (FDA) vient d’émettre un avis rappelant que le kratom est interdit et que sa consommati­on peut s’avérer mortelle.

Pas moins de 36 personnes sont décédées après avoir consommé des substances contenants du kratom, selon la FDA. Au cours des dernières années, les autorités américaine­s ont noté une croissance importante de l’importatio­n de cette substance au pays.

PAS LA DROGUE DE L’HEURE

Or, au Québec, le kratom ne semble pas être la nouvelle drogue de l’heure, croit M. Dubé. Le pharmacien-toxicologu­e estime que lorsqu’une drogue commence à être émergente, les premiers effets se ressentent au centre antipoison. Ce n’est pas le cas du kratom.

« Nous avons eu un cas en 2013, trois en 2016 et deux en 2017, a indiqué la docteure Maude St-onde, directrice médicale du Centre antipoison. La plupart avaient peu de signes et symptômes et l’un d’eux avait des signes modérés. »

Qui plus est, aucun décès lié au kratom n’a été répertorié au Québec au cours des dix dernières années, a confirmé le bureau du coroner.

La substance est toutefois bien présente au pays puisque Santé Canada a procédé à quatre saisies de kratom, uniquement en 2017.

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PIERRE-ANDRÉ DUBÉ Pharmacien­toxicologu­e
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