Le Journal de Quebec

« Cette purge a détruit des vies »

Des victimes de la « guerre contre les gais » du fédéral se réjouissen­t des excuses prévues cette semaine

- CHRISTOPHE­R NARDI Bureau parlementa­ire

OTTAWA | D’anciens militaires et employés fédéraux qui ont été sauvagemen­t expulsés de la fonction publique dans le cadre de purges des personnes LGBT des années 1980 n’en reviennent pas qu’ils recevront finalement des excuses… près de 40 ans plus tard.

« J’ai de la misère à y croire, que ça va finalement arriver après 33 ans d’attente interminab­le. J’avais perdu tout espoir qu’on admette l’enfer qu’on a fait vivre aux personnes LGBT (lesbiennes, gaies, bisexuelle­s, transsexue­lles et transgenre­s) », s’exclame Martine Roy, ancienne assistante médicale militaire expulsée des Forces armées canadienne­s parce qu’elle est lesbienne.

Le premier ministre Justin Trudeau prendra la parole mardi à Ottawa devant des victimes de la « guerre contre les gais ». Il va leur présenter des excuses formelles pour « le traitement injuste dont ils ont été victimes en raison des lois, des politiques et des programmes fédéraux », selon une invitation envoyée aux victimes connues.

À partir des années 1950 et jusqu’à 1992, le fédéral a renvoyé des milliers de fonc- tionnaires et militaires dont ils doutaient de l’hétérosexu­alité. Non seulement est-ce que l’homosexual­ité était illégale jusqu’à une certaine époque, mais Ottawa considérai­t que ces personnes étaient à risque de se faire influencer ou d’être victimes de chantage par des gouverneme­nts étrangers.

La GRC et des enquêteurs spécialisé­s au sein des forces armées avaient mené une traque jugée sauvage auprès des personnes qu’on soupçonnai­t être homosexuel­les.

SON RÊVE ENVOLÉ

Dans le cas de Mme Roy, son rêve de travailler toute sa vie au sein des FAC a été coupé court près de deux ans après son entrée en poste en 1983, à l’âge de 19 ans. C’est à ce moment-là que les membres d’une unité spéciale de la police militaire ont commencé à se douter qu’elle était lesbienne. Ils l’ont interrogée sans merci pour la pousser à révéler son homosexual­ité et celles d’autres militaires.

Après son expulsion des forces, la Montréalai­se dit être tombée dans le tourment de la drogue et de la dépression. Ce n’est que 10 ans plus tard qu’elle a réussi à s’en remettre un peu. « Cette purge a détruit des vies et a poussé des gens que je connais au suicide », dit Mme Roy émue.

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PHOTO AGENCE QMI, DARIO AYALA Martine Roy n’avait que 20 ans et une carrière prometteus­e à titre d’assistante médicale militaire lorsque des enquêteurs spéciaux de la police militaire l’ont interrogée sans pitié afin de savoir si elle et certains de ses collègues étaient...

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