Le Journal de Quebec

Toujours plus habitués

- MARIO DUMONT mario.dumont@quebecorme­dia.com

Donald Trump a franchi un nouveau seuil cette semaine. En utilisant Twitter pour diffuser les vidéos du groupe extrémiste Britain First, il a participé à une oeuvre raciste, à une désinforma­tion et à un gâchis diplomatiq­ue.

Hier dans ces pages, Pierre Martin signait un texte intitulé « Toujours plus bas ». Il a raison. J’ose cependant ajouter que la réaction collective se ramollit face aux actions indignes d’un dirigeant de son importance. Il va toujours plus bas… mais nous sommes aussi toujours plus habitués.

Moi-même cette semaine, lorsqu’il a été question de donner une place ou non à ces frasques de Donald Trump dans mes interventi­ons sur l’actualité, j’avais une hésitation. Est-ce que ça intéresse encore le public ? Des inepties de Trump sur Twitter, ça n’a rien de neuf. Est-ce encore une nouvelle ?

Nous sommes devenus habitués aux frasques de Trump ? Pas une raison pour fermer les yeux.

ON A TOUT VU

Il a insulté des gens à tort et à travers. Il a invectivé des chefs de gouverneme­nt sur leur apparence physique. Il a propagé des faussetés. Il a encouragé les racistes. Il s’est lancé dans des guerres de mots puériles avec des médias comme s’il était un quidam frustré. Comment s’offusquer encore de la nouvelle affaire ?

Ce qu’il a fait cette semaine est pourtant invraisemb­lable. Le groupe Britain First est un mouvement d’extrême droite britanniqu­e qui a eu maille à partir avec la justice du pays à cause d’incitation­s à la haine. Les dirigeants du mouvement ont notamment fait face à des accusation­s de persécutio­n religieuse anti-musulmane.

Comment l’homme le plus puissant du monde peut-il utiliser son temps et son influence pour propager les vidéos propagandi­stes de ce groupe ? Surtout que l’une des vidéos montre une bataille entre deux jeunes aux Pays-bas dont aucun n’est musulman. Une vraie fake news.

Dans le camp Trump, la réponse est suave : ce dont il est question ici, ce n’est pas de la véracité des vidéos, mais de la menace réelle de l’islam radical. Mentir, tromper et s’associer à des gens dangereux au nom du fait que la cause serait juste ? Même en prétendant combattre le radicalism­e et la violence des terroriste­s islamiques, un président ne peut pas propager n’importe quoi.

NOUVELLE CHICANE

Trump n’a laissé aucun choix à la première ministre britanniqu­e Theresa May. Le groupe d’extrême droite n’est pas fréquentab­le dans son pays. Elle devait semoncer le président américain. Ce dernier lui a évidemment répondu par des insultes sur Twitter.

Madame May était pourtant l’une de ses rares alliées sur la scène internatio­nale. Elle lui avait même lancé une invitation pour une visite officielle malgré d’énormes pétitions pour ne pas le recevoir dans le pays. Les déclaratio­ns folichonne­s de Trump ont pour le moins compliqué cette visite, et l’ont peut-être même compromise.

Faut-il continuer à dénoncer, à rétablir les faits, à s’insurger ? Oui. S’habituer à ce qui détruit la démocratie, c’est sacrifier ce que nous avons de plus précieux. Face à la bêtise, s’indigner n’est pas un droit mais un devoir.

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