Toujours plus habitués
Donald Trump a franchi un nouveau seuil cette semaine. En utilisant Twitter pour diffuser les vidéos du groupe extrémiste Britain First, il a participé à une oeuvre raciste, à une désinformation et à un gâchis diplomatique.
Hier dans ces pages, Pierre Martin signait un texte intitulé « Toujours plus bas ». Il a raison. J’ose cependant ajouter que la réaction collective se ramollit face aux actions indignes d’un dirigeant de son importance. Il va toujours plus bas… mais nous sommes aussi toujours plus habitués.
Moi-même cette semaine, lorsqu’il a été question de donner une place ou non à ces frasques de Donald Trump dans mes interventions sur l’actualité, j’avais une hésitation. Est-ce que ça intéresse encore le public ? Des inepties de Trump sur Twitter, ça n’a rien de neuf. Est-ce encore une nouvelle ?
Nous sommes devenus habitués aux frasques de Trump ? Pas une raison pour fermer les yeux.
ON A TOUT VU
Il a insulté des gens à tort et à travers. Il a invectivé des chefs de gouvernement sur leur apparence physique. Il a propagé des faussetés. Il a encouragé les racistes. Il s’est lancé dans des guerres de mots puériles avec des médias comme s’il était un quidam frustré. Comment s’offusquer encore de la nouvelle affaire ?
Ce qu’il a fait cette semaine est pourtant invraisemblable. Le groupe Britain First est un mouvement d’extrême droite britannique qui a eu maille à partir avec la justice du pays à cause d’incitations à la haine. Les dirigeants du mouvement ont notamment fait face à des accusations de persécution religieuse anti-musulmane.
Comment l’homme le plus puissant du monde peut-il utiliser son temps et son influence pour propager les vidéos propagandistes de ce groupe ? Surtout que l’une des vidéos montre une bataille entre deux jeunes aux Pays-bas dont aucun n’est musulman. Une vraie fake news.
Dans le camp Trump, la réponse est suave : ce dont il est question ici, ce n’est pas de la véracité des vidéos, mais de la menace réelle de l’islam radical. Mentir, tromper et s’associer à des gens dangereux au nom du fait que la cause serait juste ? Même en prétendant combattre le radicalisme et la violence des terroristes islamiques, un président ne peut pas propager n’importe quoi.
NOUVELLE CHICANE
Trump n’a laissé aucun choix à la première ministre britannique Theresa May. Le groupe d’extrême droite n’est pas fréquentable dans son pays. Elle devait semoncer le président américain. Ce dernier lui a évidemment répondu par des insultes sur Twitter.
Madame May était pourtant l’une de ses rares alliées sur la scène internationale. Elle lui avait même lancé une invitation pour une visite officielle malgré d’énormes pétitions pour ne pas le recevoir dans le pays. Les déclarations folichonnes de Trump ont pour le moins compliqué cette visite, et l’ont peut-être même compromise.
Faut-il continuer à dénoncer, à rétablir les faits, à s’insurger ? Oui. S’habituer à ce qui détruit la démocratie, c’est sacrifier ce que nous avons de plus précieux. Face à la bêtise, s’indigner n’est pas un droit mais un devoir.