Un V.-P. de Total prend la tête de Polytechnique
Philippe Tanguy dirigera en janvier la formation des 8300 étudiants de l’école
Un haut dirigeant de la pétrolière Total prend la tête de Polytechnique Montréal malgré la réputation controversée de la multinationale et l’opposition des étudiants. La nomination de Philippe Tanguy a été entérinée par le Conseil des ministres mercredi.
« On a aujourd’hui une firme comme Total qui fournit à une grande école comme Polytechnique son directeur général. Le symbole est fort », s’inquiète Alain Deneault, auteur de De quoi Total est-elle la somme ?.
Philippe Tanguy avait un poste de direction chez Total depuis neuf ans. Il a enseigné 15 ans au Département de génie chimique de Polytechnique Montréal. À son entrée en poste en janvier, il gérera un budget de fonctionnement de 213 millions $.
L’essayiste Alain Deneault déplore que le nouveau patron de l’école provienne non seulement de la firme Total, mais de son secteur consacré à la recherche. « Forcément les orientations de l’école tendront à se conformer aux firmes du domaine du pétrole et de l’énergie », pense-t-il.
M. Deneault dit que les contribuables québécois financent désormais un centre de recherches qui sert l’industrie pétrolière. Le budget de recherche de Polytechnique Montréal est de 75 millions $.
AVARE DE COMMENTAIRES
Le principal intéressé, Philippe Tanguy, n’a pas voulu accorder d’entrevue au Journal hier. Il préfère attendre une conférence officielle prévue en début d’année.
M. Tanguy tient à rappeler qu’il a démissionné de toutes ses fonctions et responsabilités chez Total au mois d’octobre dernier. « Je prépare depuis début novembre mon retour au Québec et à Polytechnique, et dès janvier, je serai à 150 % DG de Polytechnique Montréal », a-t-il insisté dans un courriel envoyé au Journal.
De son côté, la directrice des communications de l’institution fondée en 1873, Chantal Cantin, a salué la venue de M. Tanguy à la tête de son institution d’enseignement. « On ne forme pas les futurs ingénieurs en vase clos », a-t-elle dit, qualifiant M. Tanguy de « visionnaire scientifique ».
PAS AU COURANT
À Polytechnique Montréal hier, très peu d’étudiants étaient au courant de l’arrivée prochaine d’un ancien dirigeant pétrolier à la tête de leur école. Certains d’entre eux étaient prêts à lui laisser une chance. D’autres, au contraire, s’inquiétaient de sa venue. Rappelons que l’été dernier un Regroupement de Poly contre Total (RPCT) a mené une campagne pour dénoncer la candidature de Philippe Tanguy. Un membre fondateur de ce groupe qui n’a pas voulu être identifié hier s’est dit très déçu de la nouvelle, tout en voulant bien laisser une chance au coureur.