Pauvres Montréalais
2000 défauts sur le nouveau pont Champlain
Un an avant la fin des travaux du nouveau pont Champlain, les travailleurs ont déjà dû faire plus de 2000 réparations sur des pièces maîtresses de sa structure. Une situation anormale, qui fait craindre « un nouveau Stade olympique », selon plusieurs sources impliquées dans le projet depuis le tout début.
Soudures incomplètes, voire inexistantes, trous mal faits ou mal alignés dans l’acier, plaques de métal fissurées ou poreuses, boulons non conformes… Les pièces qui présentent le plus de défaillances sont des poutres-caissons qui proviennent de la firme Tecade, en Espagne, selon des dizaines de rapports, de photos et de vidéos que nous avons obtenus.
Ces pièces de 30 mètres de long supporteront les trois travées de circulation du pont. Certaines d’entre elles, situées tout près du pylône principal, comportaient chacune plus de 300 défauts à réparer. En mai 2017, le caisson BS2S présentait à lui seul 366 défauts, selon les documents consultés.
Il n’est pas étonnant qu’un chantier de 4,2 milliards de dollars connaisse des problèmes. Ce qui est anormal, c’est l’étendue des correctifs à apporter. C’est du moins l’opinion de six sources parmi la direction, les travailleurs et les sous-traitants.
« Qu’il y ait autant de problèmes et qu’on passe autant de temps au chantier à réparer tout ça, non, ce n’est vraiment pas normal », assure un ingénieur impliqué dans le chantier, qui a requis l’anonymat.
Le consortium Signature sur le SaintLaurent, responsable de la construction, reconnaît de son côté que des pièces expédiées d’espagne à la hâte nécessitent des correctifs (voirautretexte).
TESTS AUX ULTRASONS
C’est à l'automne 2016 que des responsables du chantier ont remarqué des problèmes sur les pièces venues d’europe. Des tests aux ultrasons ont donc été commandés à des entreprises spécialisées.
« C’est là qu’on a découvert des centaines d’anomalies. Des déficiences multiples. Puis là, je te parle de réparations de soudures critiques », dit une source qui, impliquée de près dans la construction du pont, a requis l’anonymat pour protéger sa carrière.
Des équipes de soudeurs ont donc dû passer des journées entières à faire des réparations. Selon nos sources, les poutres font toujours, en ce moment, l’objet d’inspections.
« Si les soudures ne sont pas corrigées, à la longue, dans 15 ans, dans 20 ans, c’est là que les problèmes vont commencer à sortir, dit une autre de nos sources, un ingénieur. Il faut se rappeler qu’on construit ici un pont pour 125 ans ! »
Selon nos informations, certaines pièces de béton présentent aussi des problèmes de qualité. Par exemple, un bloc d’un pilier du pont a éclaté.
Nos sources affirment que les travaux additionnels entraînés par ces problèmes compromettent sérieusement la date d’ouverture annoncée du pont, le 1er décembre 2018.
En vertu du contrat, une pénalité d’au moins 100 000 $ par jour de retard serait imposée au consortium par le gouvernement fédéral.