La pilule abortive toujours pas disponible dans la province
Les professionnels de la santé ignorent toujours quand et comment elle le sera
La pilule abortive, qui doit être disponible gratuitement au Québec d’ici « la fin de l’automne », est encore bien loin d’être mise en marché, ce qui inquiète différents intervenants en interruption de grossesse.
Le gouvernement a annoncé en grande pompe il y a quelques mois que la pilule abortive, approuvée par Santé Canada depuis 2015, serait finalement offerte sans frais aux Québécoises.
Quand sera-t-elle disponible, comment serat-elle distribuée, qui pourra la prescrire et comment sera-t-elle administrée ? Des questions qui demeurent sans réponse à la Fédération du Québec pour le planning des naissances.
« Nous n’avons aucune indication concrète. Il est encore impossible de savoir si ce sera distribué dans toutes les pharmacies ou non », se questionne Charli Lessard, coordonnatrice à la Fédération.
Questionnés par Le Journal, ni l’ordre des pharmaciens, ni le Collège des médecins, ni le ministère de la Santé ne sont en mesure de donner plus de précisions sur le protocole à mettre en place.
MÊME SCÉNARIO QU’À OTTAWA ?
Le manque d’information se fait sentir jusqu’à la frontière d’ottawa, où la pilule est disponible gratuitement depuis le mois d’août.
« Il y a régulièrement des femmes qui appellent pour savoir si nous l’avons, mais on les réfère à Ottawa », explique Patricia Larue, directrice de la Clinique des femmes de l’outaouais, située à Gatineau.
L’arrivée de la médication à Ottawa aura toutefois été marquée par un « sévère manque d’information », selon le centre Planned Parenthood Ottawa. La pilule serait d’ailleurs encore difficile à trouver. « On reçoit entre deux et dix appels par jour de gens qui ne savent pas comment y avoir accès », indique Ariane Wylie, coordonnatrice au centre de planification des naissances.
Selon elle, le nombre de médecins ayant suivi la formation pour la prescrire est insuffisant et le processus suivant l’ordonnance est « trop lourd ». « C’est sûr que c’est bien qu’elle soit remboursée par le gouvernement, mais ce n’est qu’une seule partie du casse-tête », affirme Mme Wylie.
« Je soutiens des médecins de plusieurs provinces et on entend le même message ailleurs : les gens n’ont pas le temps ni les ressources pour implanter la pilule [abortive] », ajoute-t-elle.
FEMMES EN RÉGIONS
D’une même voix, la Fédération du Québec pour le planning des naissances et la Clinique des femmes admettent s’inquiéter de revoir le « scénario d’ottawa » se reproduire chez nous.
La Fédération espère notamment que tous les médecins pourront la prescrire et seront équipés pour le faire, surtout en régions, où les cliniques d’avortement se font plus rares.
« Comme il y a une échographie nécessaire avec la prise de la médication, il ne faudrait pas que la femme ait à faire 250 km pour se rendre à l’hôpital pour ça », estime-t-elle.
Par ailleurs, une première dose de la pilule pourrait devoir être administrée devant le médecin spécialisé en interruption de grossesse, comme c’est le cas à Ottawa. Ce qui n’est pas souhaitable pour les femmes en régions, selon Mme Larue.
« IL Y A RÉGULIÈREMENT DES FEMMES QUI APPELLENT POUR SAVOIR SI NOUS L’AVONS, MAIS ON LES RÉFÈRE À OTTAWA » – Patricia Larue, directrice de la Clinique des femmes de l’outaouais, à Gatineau