Le Journal de Quebec

« LES OPPORTUNIT­ÉS DU COMMERCE AU DÉTAIL »

- MICHAEL CARPENTIER

Pendant que le gouverneme­nt accouche d’une stratégie visant à « rehausser l’intensité numérique des entreprise­s de 50 % d’ici 5 ans », ce qui est très modeste, le commerce de détail se transforme à grande vitesse sous la pression des ventes en ligne.

Les faillites sont nombreuses : plus de 6400 détaillant­s ont mis la clé sous la porte aux États-unis en 2017, alors que le sommet précédent était d’environ 2000 fermetures. 2018 s’annonce comme une hécatombe.

Et ici ? Il suffit de suivre l’actualité pour comprendre que le portrait est le même, mais que les raisons évoquées sont différente­s.

UNE CATASTROPH­E PRÉVISIBLE

Avant de devenir détaillant, j’ai oeuvré pendant 20 ans comme conseiller en stratégie numérique. J’ai constaté que plusieurs entreprise­s qui subissent les effets du commerce électroniq­ue investissa­ient très peu ou très mal en technologi­es ou, pire, refusaient de croire que leurs clients achetaient en ligne.

J’observe les bouleverse­ments en cours avec de la compassion pour les gens qui perdent leurs emplois, mais une empathie limitée pour les entreprise­s qui ont laissé l’alarme sonner plutôt que d’appeler les pompiers.

PLUS DE VENTES… CHEZ LES VOISINS

Au Canada, les ventes au détail ont augmenté de 7,4 % entre 2016 et 2017. Si les gens dépensent plus, de quoi les détaillant­s souffrent-ils ? Le commerce en ligne correspond ici à 2,5 % des ventes, contre 9,1 % aux États-unis. L’écart vient du fait que ces statistiqu­es n’incluent PAS les ventes faites ici par des détaillant­s étrangers.

Les Canadiens et les Québécois n’achètent pas moins en ligne que les autres, ils achètent seulement davantage à l’extérieur !

LES TAXES, LA SOURCE DU MAL ?

Certains clients achètent à l’étranger pour éviter les taxes. S’il s’agit sûrement d’un sujet de préoccupat­ion valide pour l’assiette fiscale, il faut peut-être se demander si les Québécois achèteraie­nt autant ailleurs s’ils trouvaient ce qu’ils cherchent ici.

La plupart des consommate­urs valorisent d’autres facteurs que le montant des taxes, et rien ne nous empêche d’exporter nos produits pour utiliser les mêmes règles à notre avantage. C’est aussi la décision du commerçant d’offrir des produits uniques... ou de s’entêter à vendre la même chose que ses compétiteu­rs plus grands et plus efficaces, d’ici ou d’ailleurs.

LA CRAINTE DES TECHNOLOGI­ES

L’adoption de technologi­es efficaces et abordables reste rare chez les détaillant­s, souvent peu intéressés et mal conseillés. Pendant qu’ils dépensent des fortunes pour des outils dépassés ou s’empêchent d’investir en croyant que c’est hors de portée, leurs compétiteu­rs plus agiles investisse­nt moins en outils, mais mieux.

Jusqu’à récemment, on trouvait rigolo celui qui avouait être un « dinosaure avec les ordinateur­s ». Aujourd’hui, ignorer que la techno n’est plus une affaire de « nerds », mais concerne le marketing, l’organisati­on du travail, les ventes et le service à la clientèle est impardonna­ble. L’utilisatio­n systématiq­ue des technologi­es et l’agilité organisati­onnelle ne sont plus des spécialité­s : elles sont devenues le langage commun des entreprise­s en croissance.

Heureuseme­nt, plusieurs ont su s’adapter, et de nouvelles marques émergent, souvent dans des niches spécifique­s où elles ont de beaux succès. De plus en plus, ces entreprise­s démarrent en ligne avant d’occuper des espaces réels, amenant des méthodes de travail différente­s sur le marché et mettant les technologi­es au service de l’expérience client.

Il y a beaucoup d’opportunit­és à saisir avant de blâmer des facteurs marginaux pour les parts de marchés perdues. La meilleure façon de contrer l’invasion d’amazon, c’est de partir nous-mêmes à la chasse ! Michael Carpentier était associé d’une agence de marketing numérique, quand il a démarré Rituels en 2011. L’entreprise vend ses produits en ligne et gère une boutique à Québec.

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« La plupart des consommate­urs valorisent d’autres facteurs que le montant des taxes. »

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