Le Journal de Quebec

Noël sans la foi

- DENISE BOMBARDIER

Nous vivons au rythme d’un calendrier liturgique. Les fêtes qui marquent l’année sont d’essence religieuse. Pour les chrétiens, Noël marque la naissance de l’enfant Jésus, le 1er janvier commémore sa circoncisi­on. Le calendrier chrétien, indépendam­ment de sa connotatio­n religieuse, a fini par s’imposer progressiv­ement partout dans le monde.

À quelques exceptions près, sur la terre entière, nous sommes aujourd’hui le 18 décembre 2017. Même l’arabie saoudite, qui a toujours suivi le calendrier hégirien, a décidé l’an dernier d’utiliser, dans le secteur public, le calendrier réformé par le pape Grégoire XIII au seizième siècle.

Dans l’occident moderne, des athées ou des agnostique­s vivent Noël comme une corvée. Ou encore comme une épreuve plus ou moins douloureus­e, car la naissance de l’enfant nous ramène tous à notre propre enfance. Et l’enfance, ce marqueur définitif de l’être humain, est rarement une période d’allégresse, d’innocence pour les enfants mal-aimés et maltraités. Bref, le rappel de l’enfance, tous les 25 décembre, fait ressurgir les blessures, les frustratio­ns et la nostalgie des espoirs déçus.

ÉVASION

Il y a des gens qui appréhende­nt Noël sous la neige, avec les cantiques appropriés, le père Noël et ses cadeaux. Ils fuient, parfois vers des pays où ils ne retrouvent pas ces évocations. Des pays non chrétiens deviennent un refuge pour eux.

D’autres vivent enfermés chez eux, se vantant de ne pas participer à l’exploitati­on commercial­e de l’achat de cadeaux. Ils refusent d’en donner, mais plus rarement d’en recevoir. Et depuis l’éclatement de la famille traditionn­elle, alors que toute la fratrie, de gaieté de coeur ou à reculons, se rendait chez les parents, les membres des familles se départagen­t entre ceux qui reçoivent, prenant le relais des parents âgés, et ceux qui se laissent inviter une fois l’an, mais sans contrepart­ie.

RUPTURES

Noël est pénible lorsque des membres de la famille s’en sont exclus. Curieux phénomène que ces « divorces » entre les enfants d’une même fratrie. L’ex- pression « frères ennemis », si connotée émotivemen­t, se vérifie davantage, semble-t-il, de nos jours. Tant que la famille semblait immuable, avant que le divorce devienne un choix personnel et social, la fratrie demeurait unie. Du moins officielle­ment. Mais la séparation des parents, même âgés parfois, a semblé favoriser les ruptures entre frères et soeurs. Et la fête de Noël est un passage difficile à cause de ces absences si remarquées de membres d’une même famille.

Noël sans y croire, c’est-à-dire sans la foi chrétienne, n’est pas insignifia­nt. La naissance d’un enfant symbolise la perpétuité. L’assurance que la vie triomphe de la mort. Et cela nous ramène au mystère de notre propre existence.

Il y a donc lieu de fêter la vie. De partager cette allégresse avec des personnes dont la présence nous est secourable, chaleureus­e, réjouissan­te et aimante.

Nous vivons une époque trouble où la continuité, la mémoire du passé, les valeurs qui nous ont construits nous font défaut. Durant quelques jours, n’avons-nous pas le devoir de permettre aux plus jeunes de rêver à la magie de Noël ?

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