Le Journal de Quebec

Trudeau blâmé

Après un séjour sur l’île paradisiaq­ue d’un riche philanthro­pe et leader religieux

- GUILLAUME ST-PIERRE

OTTAWA | Justin Trudeau, qui avait promis d’être irréprocha­ble en matière d’éthique, a dû s’excuser d’avoir violé la Loi sur les conflits d’intérêts pour avoir séjourné dans l’île privée d’un philanthro­pe milliardai­re l’hiver dernier pour ses vacances des Fêtes.

Au terme d’une enquête de près d’un an, la commissair­e à l’éthique Mary Dawson a conclu que le premier ministre a violé quatre articles de la loi. Ce blâme n’entraîne toutefois aucune sanction.

« À l’avenir, je vais faire approuver toutes mes vacances en famille par le bureau de la commissair­e », s’est excusé M. Trudeau, hier. Il est ainsi devenu le premier premier ministre canadien en fonction à être blâmé pour des gestes non éthiques. Il s’agit d’une nouvelle tuile sur les libéraux, qui ont passé les derniers mois à défendre l’éthique de leur ministre des Finances, Bill Morneau.

Le coeur de l’affaire consistait à connaître la nature de la relation entre M. Trudeau et l’aga Khan. Le premier ministre s’est défendu d’avoir mal agi en soulignant que le chef spirituel était un ami personnel et qu’il pouvait donc accepter le « cadeau » de séjourner sur son île privée des Bahamas.

DES AMIS ?

Or, la commissair­e a déterminé que « M. Trudeau et l’aga Khan ne sont pas des amis au sens de la loi ». En conférence de presse, M. Trudeau a rejeté l’interpréta­tion de la commissair­e en martelant que l’aga Khan est bel et bien un « ami de la famille ».

« C’est pourquoi je n’ai pas fait approuver ce voyage en famille, a insisté M. Trudeau. Mais vu le rapport de la commissair­e, je prendrai toutes les précaution­s à l’avenir. »

Les vacances de Justin Trudeau et de sa famille sur l’île de l’aga Khan ont coûté quelque 215 000 $ aux contribuab­les.

La commissair­e juge que Justin Trudeau a reçu un « cadeau » de la part du philanthro­pe lourdement subvention­né par le gouverneme­nt et dont plusieurs lobbyistes représente­nt les intérêts à Ottawa. Elle conclut que l’aga Khan cherchait possibleme­nt à « influencer » le premier ministre en l’invitant sur son île privée.

Ottawa a versé 330 M$ à la Fondation Aga Khan depuis 1981, dont 110 M$ depuis l’arrivée au pouvoir de Justin Trudeau en 2015. M. Trudeau soutient qu’il n’a pas discuté de politique canadienne ou des affaires de la fondation avec l’aga Khan durant son séjour sur son île il y a un an.

CADEAU

La commissair­e blâme aussi Justin Trudeau parce qu’il ne s’est pas récusé lors de discussion­s politiques qui auraient pu favoriser l’aga Khan ou sa fondation. Il aurait aussi omis « de gérer ses affaires personnell­es de manière à éviter d’avoir cette possibilit­é ».

La commissair­e Dawson a aussi conclu que M. Trudeau a enfreint la loi en acceptant de voyager à bord de l’hélicoptèr­e personnel de l’aga Khan pour se rendre sur l’île privée.

Tant les conservate­urs que les néo-démocrates voient dans les gestes du premier ministre un manque de jugement.

« Les libéraux s’excusent juste quand ils se font prendre la main dans le sac », déplore le néo-démocrate Alexandre Boulerice.

 ??  ??
 ?? PHOTOS BORIS PROULX ET COURTOISIE ?? C'est un Justin Trudeau ébranlé qui s'est excusé hier, devant les médias, de ne pas avoir demandé la permission à la commissair­e à l'éthique du Canada pour son voyage sur l'île privée de son « ami » le milliardai­re Aga Khan. Ce Noël, M. Trudeau restera au pays.
PHOTOS BORIS PROULX ET COURTOISIE C'est un Justin Trudeau ébranlé qui s'est excusé hier, devant les médias, de ne pas avoir demandé la permission à la commissair­e à l'éthique du Canada pour son voyage sur l'île privée de son « ami » le milliardai­re Aga Khan. Ce Noël, M. Trudeau restera au pays.

Newspapers in French

Newspapers from Canada