Trudeau blâmé
Après un séjour sur l’île paradisiaque d’un riche philanthrope et leader religieux
OTTAWA | Justin Trudeau, qui avait promis d’être irréprochable en matière d’éthique, a dû s’excuser d’avoir violé la Loi sur les conflits d’intérêts pour avoir séjourné dans l’île privée d’un philanthrope milliardaire l’hiver dernier pour ses vacances des Fêtes.
Au terme d’une enquête de près d’un an, la commissaire à l’éthique Mary Dawson a conclu que le premier ministre a violé quatre articles de la loi. Ce blâme n’entraîne toutefois aucune sanction.
« À l’avenir, je vais faire approuver toutes mes vacances en famille par le bureau de la commissaire », s’est excusé M. Trudeau, hier. Il est ainsi devenu le premier premier ministre canadien en fonction à être blâmé pour des gestes non éthiques. Il s’agit d’une nouvelle tuile sur les libéraux, qui ont passé les derniers mois à défendre l’éthique de leur ministre des Finances, Bill Morneau.
Le coeur de l’affaire consistait à connaître la nature de la relation entre M. Trudeau et l’aga Khan. Le premier ministre s’est défendu d’avoir mal agi en soulignant que le chef spirituel était un ami personnel et qu’il pouvait donc accepter le « cadeau » de séjourner sur son île privée des Bahamas.
DES AMIS ?
Or, la commissaire a déterminé que « M. Trudeau et l’aga Khan ne sont pas des amis au sens de la loi ». En conférence de presse, M. Trudeau a rejeté l’interprétation de la commissaire en martelant que l’aga Khan est bel et bien un « ami de la famille ».
« C’est pourquoi je n’ai pas fait approuver ce voyage en famille, a insisté M. Trudeau. Mais vu le rapport de la commissaire, je prendrai toutes les précautions à l’avenir. »
Les vacances de Justin Trudeau et de sa famille sur l’île de l’aga Khan ont coûté quelque 215 000 $ aux contribuables.
La commissaire juge que Justin Trudeau a reçu un « cadeau » de la part du philanthrope lourdement subventionné par le gouvernement et dont plusieurs lobbyistes représentent les intérêts à Ottawa. Elle conclut que l’aga Khan cherchait possiblement à « influencer » le premier ministre en l’invitant sur son île privée.
Ottawa a versé 330 M$ à la Fondation Aga Khan depuis 1981, dont 110 M$ depuis l’arrivée au pouvoir de Justin Trudeau en 2015. M. Trudeau soutient qu’il n’a pas discuté de politique canadienne ou des affaires de la fondation avec l’aga Khan durant son séjour sur son île il y a un an.
CADEAU
La commissaire blâme aussi Justin Trudeau parce qu’il ne s’est pas récusé lors de discussions politiques qui auraient pu favoriser l’aga Khan ou sa fondation. Il aurait aussi omis « de gérer ses affaires personnelles de manière à éviter d’avoir cette possibilité ».
La commissaire Dawson a aussi conclu que M. Trudeau a enfreint la loi en acceptant de voyager à bord de l’hélicoptère personnel de l’aga Khan pour se rendre sur l’île privée.
Tant les conservateurs que les néo-démocrates voient dans les gestes du premier ministre un manque de jugement.
« Les libéraux s’excusent juste quand ils se font prendre la main dans le sac », déplore le néo-démocrate Alexandre Boulerice.