Le Journal de Quebec

Nos anges gardiens

- JOSÉE LEGAULT josee.legault@quebecorme­dia.com

La neige tombait goulûment comme de belles grosses balles de ouate. C’était le soir. Devant ma fenêtre, le parc s’endormait doucement. Les arbres, tout enveloppés de blanc, illuminaie­nt mon coin de ville d’une lumière doucereuse que je n’oublierai jamais.

25 décembre 1995. Un Noël pas comme les autres. Les anges passaient, mais sans trop s’attarder. Mon premier Noël sans ma maman. Après un long combat contre le cancer, ma mère avait pris son billet pour son ultime voyage.

Trois ans après le départ de mon père, c’était aussi mon premier Noël d’orpheline. Pour ne pas imposer ma tristesse à ma jeune soeur, elle était partie quelques jours à la campagne chez des amis.

Un Noël pas comme les autres. Incapable de « fêter », jamais, de toute ma vie, je ne m’étais sentie aussi seule. À la recherche d’un signe de ma maman, désespérém­ent, je balayais du regard les cieux peu étoilés de Montréal. Et pourtant, rien.

QUE FAISAIT-ELLE ?

Pas même l’étincelle d’une étoile perdue entre deux visites du père Noël. Rien. La neige, le parc et les arbres. Tous étaient silencieux. La nuit hivernale se pointait déjà au gré des minutes qui s’égrainaien­t comme un vieux chapelet oublié.

Mais que faisait donc ma mère ce soir ? Comment fêtait-elle Noël tout là-haut ? Riait-elle de bon coeur avec sa maman adorée ? Avaitelle enfin rencontré son idole de toujours, l’acteur américain James Stewart ? Avait-elle retrouvé son frère tant aimé, décédé beaucoup trop jeune ?

Que faisait-elle, Micheline, ma maman si éprouvée par une vie trop dure ? Ma mère si généreuse pour ma soeur et moi de son coeur grand comme le monde malgré ses trop maigres moyens ?

Ma mère qui, chaque Noël, se privait de tout depuis des mois pour nous offrir les cadeaux dont nous rêvions sans qu’on ne se préoccupe des sacrifices qu’elle faisait pour nous.

Ma mère qui, à chaque Noël, pendant que notre père était absent, nous concoctait son fameux réveillon maison dont le clou tant anticipé était ses légendaire­s petits pains magiques au poulet et céleri croquant.

DONNER LA LUNE

Ce 25 décembre 1995, j’aurais donné la lune pour la joie de pouvoir les savourer à nouveau en sa compagnie. Comme disait ma grand-mère, quand ils sont enrobés d’amour, les plus grands bonheurs se cachent souvent dans les plus petites choses.

Après une année éprouvante sur le plan personnel, pour ce Noël 2017, j’ai choisi à nouveau de le passer seule. Question de calmer le bruit ambiant pour mieux entendre celui des rêves appelés à renaître.

Mais cette fois-ci, je n’aurai pas à chercher ma maman du regard entre les étoiles parce que je la sais toujours avec moi. Elle est mon ange gardien.

À vous toutes et tous, je vous souhaite un Noël de coeur.

Même lorsqu’on est seul, par choix ou non, on ne l’est jamais tout à fait parce que nous avons le privilège d’être en vie. Ce privilège est celui d’espérer. Et à tous nos anges gardiens, Joyeux Noël !

Incapable de « fêter » avec d’autres, jamais, de toute ma vie, je ne m’étais sentie aussi seule.

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