Le Journal de Quebec

Il embauche 13 employés pour éviter d’aller en CHSLD

Malgré son handicap, l’homme gère leur horaire et s’occupe de les payer

- AMÉLIE ST-YVES

TROIS-RIVIÈRES | Un homme de 45 ans lourdement handicapé ne peut pas se gratter le bout du nez, mais gère 13 employés à temps partiel qui lui permettent de rester à domicile.

Alain Gaudet a le sens de l’entreprene­uriat. Même s’il est incapable de bouger, il fait tout comme s’il gérait une petite entreprise.

Il engage lui-même ses 13 « petits anges ». Il organise leurs horaires et s’occupe de leurs paies.

Il peut compter sur eux pour le lever, prendre son bain et cuisiner. Il y a même un préposé qui dort dans son appartemen­t de Trois-rivières la nuit.

À tour de rôle, ses employés vont l’aider de quelques heures à 20 heures par semaine.

Il a monté tout un système qui lui permet de vivre encore dans son logement, même s’il arrive à peine à parler et à bouger le bout des doigts.

Il aimerait cependant pouvoir payer ses employés plus de 12 $ l’heure, mais il peine à arriver.

Pour pouvoir rester à domicile et éviter d’aller en centre d’hébergemen­t de soins de longue durée (CHSLD), il lui en coûte 75 000 $ par année. Le gouverneme­nt lui donne 30 000 $. Il doit organiser des activités pour recueillir les 45 000 $ restants.

Pourtant, ses efforts font épargner 34 000 $ au gouverneme­nt ( voir autre texte).

SON PETIT CHÂTEAU

L’homme de 45 ans souffre d’amyotrophi­e spinale de type 3, une maladie dégénérati­ve incurable, qui le rend prisonnier de son corps. Ce trouble génétique entraîne la destructio­n de ses muscles. La dernière fois qu’il a soulevé une fourchette pour manger un repas par lui-même, c’était le 12 octobre 2012.

Il affirme pourtant vivre le rêve de toute personne lourdement handicapée, car il est encore chez lui.

« Ici, c’est mon petit monde à moi. Il n’y a pas d’étrangers qui entrent quand je ne veux pas. Il n’y a pas de chicane, c’est mon petit château », déclare-t-il.

Il peut y faire plein de choses à partir de sa voix et de petites télécomman­des installées sous ses doigts. Il arrive, entre autres, à ouvrir et fermer des portes, allumer les lumières, fermer les stores, contrôler le chauffage ou l’air conditionn­é.

BRAS AUTOMATISÉ

Dans son appartemen­t, il peut écouter Netflix sur une télévision fixée au plafond de sa chambre, installée à côté des rails qui permettent à ses employés de le transférer jusqu’au bain qu’il prend tous les jours.

Le bras automatisé Jaco, qui vaut 40 000 $, est fixé à son fauteuil et lui permet de faire des choses aussi banales que prendre un verre d’eau. Il a été le premier au Québec à obtenir ce bras, grâce à ses donateurs, mais aussi à son ami, l’humoriste Mike Ward, et à un étranger anonyme qui a contribué à hauteur de 22 000 $.

Le temps des Fêtes le rend toujours un peu nostalgiqu­e.

« Plus les années passent, plus j’apprécie les Noëls en famille. Ma mère est encore là, mon frère est en santé. On profite vraiment de l’esprit des Fêtes pour se rencontrer et retisser nos racines », dit-il.

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PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE, AMÉLIE ST-YVES Alain Gaudet, un homme de 45 ans lourdement handicapé, a acheté de l’équipement qui lui permet de demeurer chez lui.

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