Le Journal de Quebec

Les cobayes ontariens

- DAVID DESCÔTEAUX david.descoteaux@quebecorme­dia.com

Ceux qui croient qu’un bond spectacula­ire du salaire minimum ne fera pas de dommage chez les PME sont probableme­nt les mêmes qui pensent que le père Noël est réellement venu manger des biscuits et boire un verre de lait chez eux dans la nuit du 25 décembre dernier.

En 2017, le gouverneme­nt ontarien de Kathleen Wynne a annoncé une hausse de 32 % du salaire minimum en seulement 18 mois. Celui-ci est passé de 11,40 $ à 11,60 $ en octobre, et bondira dans quelques jours, passant de 11,60 $ à 14 $ l’heure le 1er janvier.

Heureuseme­nt pour nous – remercions notre gouverneme­nt, qui a judicieuse­ment évité de hausser aussi drastiquem­ent le salaire minimum ici –, nous pourrons observer les résultats de cette expérience dans les prochains mois, afin de voir s’il s’agit d’une politique efficace ou non.

En effet, la division ontarienne de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendan­te (FCEI) a décidé de faire le suivi de cette expérience. Pendant les 18 prochains mois, la FCEI va suivre à la trace un ensemble de PME afin de voir comment elles réagissent à la hausse.

La FCEI a déjà effectué un premier sondage, en décembre, et a partagé les résultats dans le Financial Post. Lorsqu’on demande aux propriétai­res de PME : « Avez-vous déjà effectué les changement­s suivants afin de vous préparer à la hausse du salaire minimum à 15 $ en janvier 2019 ? »,

■ 54 % répondent qu’ils ont réduit ou annulé des plans d’embauche.

■ 51 % ont augmenté leurs prix.

■ 44 % ont mis sur la glace des projets d’expansion. ■ 31 % ont réduit le nombre total d’heures des employés.

■ 28 % ont réduit le nombre de leurs employés.

■ 20 % ont remplacé des travailleu­rs par la technologi­e et l’automatisa­tion.

■ 18 % ont déjà réduit les avantages sociaux de leurs employés.

Les sceptiques diront de prendre ce sondage, fait par un organisme qui fait du lobbying pour les PME, avec un grain de sel. Mais disons que ça n’augure pas bien pour le petit travailleu­r.

En fait, croire qu’on peut hausser sans conséquenc­e le coût des employés de 32 % sans que les profits de l’entreprise ne suivent tient de la pensée magique.

Si la loi de la gravité tient toujours, des patrons devront réduire les heures de travail de certains employés, augmenter leurs prix et/ou faire de plus en plus appel aux « robots » là où c’est possible.

Une meilleure solution pour les travailleu­rs au bas de l’échelle serait d’augmenter l’exemption personnell­e de base dans leur déclaratio­n d’impôt.

De cette façon, ils en donneraien­t moins à l’état et en garderaien­t plus dans leurs poches, sans mettre à risque l’entreprise qui les embauche.

Rappelons qu’au Québec, le salaire minimum a augmenté de 50 cents le 1er mai, pour atteindre 11,25 $. Le gouverneme­nt veut le hausser progressiv­ement jusqu’à 12,45 $ l’heure d’ici quatre ans. C’est quand même un bond de 16 %, ce qui est supérieur au rythme de l’inflation. Mais quand on compare avec ce que fait l’ontario, c’est raisonnabl­e. Très raisonnabl­e.

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