Des logiciels pour aider les élèves à lire et à écrire
Ces outils mènent à des « réussites exceptionnelles », mais aussi à des « dérapages »
Les élèves en difficulté qui utilisent des logiciels pour les aider à lire et à écrire en classe sont plus nombreux que jamais, a constaté Le Journal. Or, l’accès à ces outils est parfois problématique alors que des orthopédagogues constatent des « dérapages ».
Selon des données obtenues auprès d’une vingtaine de commissions scolaires, le nombre d’élèves qui utilisent des logiciels « d’aide technologique » en classe a considérablement augmenté depuis cinq ans ( voir encadré). Dans certaines commissions scolaires, leur nombre a plus que doublé.
Ces logiciels d’aide à la rédaction ou à la lecture, comme Wordq ou Lexibar, sont utilisés par plusieurs élèves qui ont des troubles d’apprentissage comme la dyslexie ou la dysorthographie. Certains outils, qu’on appelle des prédicteurs de mots, suggèrent des mots bien orthographiés à utiliser selon ce que l’élève tape au clavier. D’autres logiciels de synthèse vocale « lisent à voix haute » un texte ou encore une phrase que l’élève vient de rédiger. Ces outils peuvent être comparés à une paire de lunettes, indique Jean Chouinard, conseiller pédagogique au Service national du RÉCIT en adaptation scolaire. Il s’agit d’« orthèses pédagogiques » qui permettent à un élève de compenser un trouble neurologique. L’accès à ces outils devient une question d’équité, affirme-t-il.
AMÉLIORER LES COMPÉTENCES
Ces outils « compensatoires » aident l’élève à mieux apprendre, ajoute Madeleine Fauteux, conseillère pédagogique à l’institut des troubles d’apprentissage. « Au départ, les gens avaient tendance à penser que c’était une béquille. Mais des recherches ont démontré que les aides technologiques permettent vraiment d’améliorer les compétences », dit-elle.
Ces logiciels permettent des « réussites exceptionnelles » chez certains élèves, ajoute Mme Fauteux. Depuis près de 10 ans, le ministère de l’éducation autorise l’utilisation de ces logiciels en classe et lors des évaluations si l’élève présente des difficultés marquées et persistantes, malgré de nombreuses interventions ciblées et répétées. Un diagnostic peut être utile, mais il n’est pas obligatoire, souligne M. Chouinard. À l’association des orthopé- dagogues du Québec (ADOQ), on constate toutefois de « nombreux dérapages » à ce sujet.
LE « DANGER »
« Il s’avère tentant d’offrir le recours à certains outils technologiques […] en remplacement d’une intervention orthopédagogique qui permettrait à l’apprenant de remédier totalement ou en partie à ses difficultés », peut-on lire dans un mémoire rédigé l’an dernier, dans lequel L’ADOQ incite à la « prudence ».
« C’est vrai qu’à certains endroits, on donne rapidement l’ordinateur, mais sans offrir de soutien à l’élève », affirme Madeleine Fauteux. Le « danger » est de penser que l’élève n’a plus besoin de services parce qu’il utilise maintenant des logiciels d’aide, ce qui serait « de la pensée magique », ajoute-t-elle.
Jean Chouinard reconnaît de son côté qu’il peut y avoir des « dérapages », mais il estime que les problèmes de méconnaissance et d’accès aux outils technologiques sont beaucoup plus fréquents : « Parfois (le recours à ces outils se fait) trop tôt, mais majoritairement, ça se fait souvent trop tard », dit-il ( voir autre texte). « Le gros problème, c’est le manque de formation » à ce sujet dans le réseau scolaire, ajoute M. Chouinard.