Le Journal de Quebec

Le tabou du dopage

- KEVIN DUBÉ

Comment des hommes aux charpentes titanesque­s réussissen­t-ils à soulever des charges qui dépassent complèteme­nt l’entendemen­t ? Le caractère inhumain de la discipline des hommes forts mène inévitable­ment à des doutes sur la légitimité des produits consommés par ces athlètes de force, et le sujet demeure tabou dans le milieu.

Y a-t-il du dopage chez les hommes forts? Absolument. Depuis 20 ans, quelques-uns de ces titans des temps modernes sont morts abruptemen­t, la majorité du temps d’un arrêt cardiaque, et ce, à un très bas âge.

Certains de ces décès demeurent mystérieux, et rien n’indique qu’ils sont décédés d’un abus d’une quelconque substance illicite. Toutefois, en novembre 2013, après que l’homme fort américain Mike Jenkins ait succombé d’un arrêt cardiaque à l’âge de 31 ans, le coroner Graham Hetrick a statué que le colosse de 6 pi 6 po et 400 lb avait fait un usage abusif de stéroïdes anabolisan­ts qui avait, incidemmen­t, eu raison de son coeur.

TOUS NE SONT PAS DOPÉS

Malgré tout, le sujet demeure sensible dans le milieu. L’écrivain Paul Ohl est catégoriqu­e : il est humainemen­t impossible par une simple alimentati­on à forte teneur en protéines que des hommes puissent atteindre un poids et une force aussi élevée que celle des hommes forts.

« Il y a une omerta là-dessus. Tu ne réussiras jamais à convaincre un gars de te révéler sa pharmacie. J’ai eu des confidence­s, mais j’ai donné ma parole », assure celui qui est considéré comme un expert de la discipline, ayant notamment passé plusieurs années dans la garde rapprochée d’hugo Girard.

Paul Ohl tient toutefois à préciser sa pensée : il ne dit pas que tous les athlètes de force sont dopés.

« Il y a des gens qui le font intelligem­ment et qui ont recours à des supplément­s extrêmemen­t puissants. Mais c’est 100 % des hommes forts. Le problème, c’est que certains gars doublent ou triplent les doses et mélangent les produits. »

« LE CHOIX DE CHAQUE ATHLÈTE »

Si le sujet est tabou dans le milieu des hommes forts en général, Jean-françois Caron n’a pas peur d’en parler.

« Je réponds souvent la même chose : c’est le choix de chaque athlète. Ça reste un sport de génétique. Je comprends les gens d’avoir des doutes parce qu’on fait des choses qui sont hors de leur portée. Par contre, des champions, je n’en connais aucun qui vient dans une bouteille. Il faut que tu penses avec ta tête. Le dopage, ça ne va pas t’améliorer de 50 %, de toute façon, et si tu meurs de ça, tu ne te seras pas mis riche avec. »

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