Le Journal de Quebec

Lepost, un film pour émouvoir les journalist­es

- GUY FOURNIER guy.fournier@quebecorme­dia.com

Il fallait voir, vendredi soir à l’émission 24/60, Marie-Maude Denis et Alain Saulnier trépigner comme des ados en commentant Le Post, dernier film de Steven Spielberg. Même que Marie-maude, vedette de l’émission Enquête, dit avoir pleuré et que Saulnier, ancien patron de l’info à la SRC, a révélé avoir eu le « motton » durant la projection.

Voilà des journalist­es bien émotifs ! J’avise mes lecteurs, ceux qui ne sont pas journalist­es évidemment, que Le Post ne leur fera pas verser une seule larme. Ils risquent même de s’ennuyer un peu durant les presque deux heures que dure le film.

Le Post raconte les jours ayant précédé la décision du quotidien de Washington de publier des extraits des « papiers du Pentagone ». Cette étude hautement secrète relate les dessous de la politique américaine en Asie du Sud-est depuis la Deuxième Guerre mondiale jusqu’à la fin de 1968. Les papiers furent d’abord transmis au New York Times par Daniel Ellsberg, ancien « marine » ayant travaillé au dossier avant de devenir un pacifiste militant.

Les papiers du Pentagone montrent à quel point le gouverneme­nt américain a menti au Congrès et à la population pendant 23 ans, en particulie­r durant la guerre du Vietnam, responsabl­e de la mort de 57 000 Américains et d’un million et demi de Vietnamien­s.

LE POST PREND LA RELÈVE

Dès que parurent les premiers extraits en juin 1971, le procureur général des États-unis accusa le New York Times de violer la loi sur l’espionnage et la Cour ordonna au quotidien de cesser toute publicatio­n. C’est là que le Post, entré aussi en possession des fameux documents, décida de prendre la relève, défiant la justice et le président Richard Nixon.

Le quotidien de Washington était alors la propriété de Katharine Graham (Meryl Streep) dont le mari, récemment décédé, avait des amis en haut lieu, notamment Robert Mcnamara, secrétaire à la Défense sous John F. Kennedy, et Lyndon B. Johnson, principal architecte de la guerre du Vietnam. Madame Graham et Ben Bradlee (Tom Hanks), son éditeur, risquaient la prison si on jugeait que le journal violait la loi. Une condamnati­on qui compromett­rait du même coup l’offre publique d’actions du journal et son entrée en bourse.

LE SCANDALE DU WATERGATE

Si le Post est devenu célèbre, il le doit beaucoup plus à la révélation du scandale du Watergate qu’à la publicatio­n des papiers du Pentagone. Le New York Times fut d’ailleurs le premier à en publier des extraits. Si on connaît peu l’histoire des papiers, le film de Spielberg n’apprendra rien de plus. Tout ce tintouin autour de leur publicatio­n paraîtra très surfait à la plupart des spectateur­s.

Le Post est un film très convention­nel et même un peu pompier. L’excellente interpréta­tion de Meryl Streep n’arrive pas à nous faire adhérer à un scénario banal et convenu. Si vous êtes dans le mood de voir des journalist­es qui triomphent, visionnez plutôt Spotlight (si vous ne l’avez pas fait encore), gagnant de l’oscar du meilleur film et du meilleur scénario en 2016.

Spotlight rappelle la fameuse enquête du Boston Globe (prix Pulitzer) ayant révélé que les autorités du diocèse de Boston avaient protégé durant des décennies de très nombreux prêtres pédophiles. Le film de Tom Mccarthy est plus sobre et beaucoup plus émouvant que The Post. Sauf peut-être pour des journalist­es…

TÉLÉPENSÉE DU JOUR

Est-ce parce qu’ils doivent réserver leurs salles deux ans à l’avance que tant de blagues des humoristes datent ?

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