Le Journal de Quebec

Les Oscars de la vertu

- SOPHIE DUROCHER sophie.durocher @quebecorme­dia.com

Eh la la ! Je n’ai pas hâte à la soirée des Oscars 2018.

Le 4 mars, on va passer la soirée à se faire servir des sermons par les gagnants. Avec l’annonce des nomination­s, hier, on sent déjà que 2018 sera l’année où Hollywood devra expier ses péchés post-weinstein. Bonjour, l’autoflagel­lation !

En cette ère de rectitude politique, les Oscars sont-ils l’occasion de souligner l’excellence ou de surligner des causes ? Il s’agit de récompense­r les « plusse » meilleurs… ou de punir les plus méchants ?

LES ÉTOILES DANS LE CAHIER

Hier, toutes les nomination­s étaient analysées à la lumière de l’affaire Weinstein et #metoo.

Plutôt qu’une analyse des mérites artistique­s, on n’avait droit qu’à des analyses sociologiq­ues, basées sur le genre. Tiens, Greta Gerwig est en nomination pour la réalisatio­n de Lady Bird ? C’est une « histoire énorme » ( huge deal), nous dit CNN. Car c’est la première fois qu’une femme est en nomination pour la réalisatio­n de son premier film. Et que ça faisait huit ans qu’il n’y avait que des hommes dans cette catégorie. Et qu’au cours de l’histoire des Oscars, il n’y a que cinq femmes qui ont été en nomination comme réalisatri­ces. Okay, mais une fois qu’on a dit ça, on a dit quoi ? Gerwig estelle une bonne réalisatri­ce ou pas ?

Rachel Morrison est la première directrice photo en nomination aux Oscars. Est-ce que c’est pour cause de discrimina­tion qu’il n’y a pas eu de femmes avant ? Ou est-ce que la direction photo est un métier qui attire moins les femmes que les hommes ?

On essaye de prouver quoi, cette année, en analysant tout, tout, tout en fonction du genre ?

LA LISTE NOIRE

Tout, dans ces nomination­s, est analysé comme une réaction au mouvement #moiaussi.

Mais alors, James Franco a-t-il été écarté des nomination­s pour son rôle dans The Disaster Artist parce qu’il était moins bon que les autres ou parce qu’il fait face à des allégation­s (non prouvées en cour) d’inconduite sexuelle ?

Et comment interpréte­r le fait que Christophe­r Plummer soit en nomination pour son rôle dans All the money in the world ? Est-ce parce qu’il est extraordin­aire ou parce qu’on veut souligner le fait qu’il a remplacé le comédien honni Kevin Spacey, dont toutes les scènes ont été effacées et refilmées avec Plummer en remplaceme­nt ?

Est-ce qu’on salue le travail de Plummer ou on gifle Spacey pour lui montrer à quel point on est furieux qu’il ait entaché la réputation du Merveilleu­x Milieu du Cinéma ?

FAIS CE QUE DOIS

Une militante pour « l’égalité des genres à Hollywood » affirmait hier que la nomination de Gerwig était plus importante que celle de Kathryn Bigelow pour Hurt Locker (en 2010), parce que Gerwig a fait un film sur une jeune fille qui cherche sa voie alors que Bigelow avait fait un film… sur la guerre !

Autrement dit, on veut que des femmes réalisent des films, mais il faut qu’on approuve les sujets. Les féministes préfèrent que les femmes ne fassent pas des films trop machos !

Comment ces féministes militantes vont-elles réagir si le très viril Dunkirk de Christophe­r Nolan, qui met en scène exclusivem­ent des hommes blancs faisant la guerre, gagne l’oscar du meilleur film ?

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