Le Journal de Quebec

Des menaces avant l’attentat

Avant l’attentat, la communauté musulmane a été la cible d’actes répréhensi­bles

- NICOLAS LACHANCE

La mosquée de Québec et la communauté musulmane ont été la cible de plusieurs menaces et de gestes à caractère haineux dans l’année précédant la tuerie, révèle l’ex-président du Centre culturel islamique de Québec (CCIQ).

Placé devant les projecteur­s à la suite de la tuerie, Mohamed Yangui est resté silencieux à l’issue de son mandat de président du CCIQ. Un an après le tourbillon de la tuerie à la grande mosquée, l’homme s’est confié au Journal.

Avant même la tragédie, Mohamed Yangui avait le mandat d’ouvrir le dialogue avec les gens de Québec. Cette décision avait été prise après l’événement de la tête de cochon retrouvée devant la porte de la mosquée en juin 2016.

UNE CARTE DE VISITE

Des menaces contre cinq épiceries halal avaient également été répertorié­es. Ces gestes n’ont d’ailleurs jamais été rendus publics, à l’été 2016, car les propriétai­res craignaien­t pour leur sécurité. Des individus entraient dans les épiceries, proféraien­t des menaces et laissaient une carte de visite. « C’était La Meute », ont confirmé au Journal l’une des propriétai­res ainsi que Mohamed Yangui.

L’épicerie-boucherie Assalam, du propriétai­re Azzedine Soufiane décédé le soir de la tuerie à la mosquée, avait d’ailleurs été visée.

« Nous avions reçu des menaces. Ç’a été une année très achalandée », a dit M. Yangui.

Il était d’ailleurs en contact direct avec le Service de police de la Ville de Québec (SPVQ) pour ces dossiers.

C’est à la suite de ces événements que l’ex-président a décidé de prendre une année sabbatique de son travail de comptable afin de se concentrer sur la présidence du CCIQ.

Déjà, il voulait « démystifie­r l’islam » auprès de gens de Québec et dialoguer. « J’ai essayé de calmer le jeu. Avec les fidèles, nous avons tracé la stratégie de la mosquée pour les prochaines années afin de souder la communauté », a indiqué M. Yangui.

L’homme a mis sur pied des activités, comme des BBQ, pour inviter les gens de Québec à venir à leur rencontre. « Nous étions vers l’ouverture », a-t-il dit. Mohamed sentait la peur dans la population.

Aujourd’hui, il affirme que le gouverneme­nt doit continuer à travailler afin de changer les mentalités. « Ils doivent faire la promotion de l’inclusion », a-t-il déclaré.

L’ATTENTAT DÉVASTATEU­R

Puis, le pire est survenu. Le 29 janvier, c’est la tuerie. D’ailleurs, Mohamed Yangui aurait lui aussi pu y passer si son fils n’avait pas eu de la difficulté avec la résolution d’un problème de mathématiq­ue. Quelques minutes avant le début de la prière, Mohamed a décidé de rester aider son fils Aziz. « Ça reste gravé. Mon fils me répète souvent qu’il m’a sauvé la vie », relate M. Yangui.

D’autres gestes haineux sont également survenus après l’attentat (voir chronologi­e).

SHAWINIGAN | Le chef péquiste Jean-françois Lisée accuse le premier ministre Philippe Couillard d’avoir manqué « de hauteur » en reliant la montée de l’extrême droite au Québec au débat identitair­e qui secoue la province depuis plusieurs années.

« Vous savez, il y a deux Philippe Couillard. Parfois, il y a un Philippe Couillard chef d’état, au-dessus de la mêlée. Parfois, il y a celui qui n’est pas à la hauteur des événements », a dit M. Lisée, en réaction aux propos tenus de la Chine par M. Couillard.

Un an après l’attentat contre la mosquée de Québec, l’heure devrait plutôt être à « la compassion et la solidarité », croit le chef péquiste.

M. Lisée accuse aussi M. Couillard d’avoir commis « une faute historique grave » en refusant de donner suite à une vingtaine de mesures d’intégratio­n des immigrants au marché du travail et de lutte à la discrimina­tion proposées par le Parti québécois dans la foulée de l’attentat.

« C’était le moment de le faire, même François Legault était prêt à mettre de l’eau dans son vin, ce qui est rare. Il fallait saisir cette occasion », a dit M. Lisée.

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PHOTO JEAN-FRANÇOIS DESGAGNÉS Mohamed Yangui, ex-président du Centre culturel islamique de Québec, s’est confié au Journal un an après la fusillade.
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