Le Journal de Quebec

La « canne » de vers ouverte par Mélanie

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Je me demande si Mélanie Joly était consciente d’ouvrir une « canne » de vers aussi énorme peu de temps après sa nomination comme ministre du Patrimoine, en lançant la révision de toutes les lois, agences et organismes fédéraux qui touchent de près ou de loin à la culture et à la propriété intellectu­elle.

Quand on en embrasse aussi large, la plupart des personnes qui risquent d’être affectées n’arrivent plus à contempler l’ensemble. Elles s’accrochent à des détails. L’affaire Netflix en est un bon exemple. Netflix prend toute la place, alors que c’est peu de chose dans cet immense chantier auprès duquel la reconstruc­tion de l’échangeur Turcot est presque un jeu d’enfant.

La semaine dernière, à Prime Time in Ottawa, un colloque organisé par la Canadian Media Producers Associatio­n (CMPA), pendant anglophone de notre Associatio­n québécoise de la production médiatique (AQPM), l’affaire Netflix a encore occupé beaucoup de place.

Lors de son allocution, la ministre Joly a soulevé une petite partie du voile sur cette entente dont on sait bien peu. Elle a dit que c’est « un passage transitoir­e d’ici à ce qu’on trouve les moyens d’assurer la survie du contenu canadien à l’ère du numérique ». Madame Joly a de plus laissé entendre que la révision de la loi sur la radiodiffu­sion devrait résoudre l’épineuse question des services de distributi­on par contournem­ent.

DES PATATES CHAUDES

Combien de temps faudra-t-il pour en arriver à des lois rajeunies sur la radiodiffu­sion et les télécommun­ications? Combien de temps pour réviser la loi sur la propriété intellectu­elle et l’adapter au contexte numérique? Au train où vont les choses, rien ne sera conclu avant l’élection de l’an prochain.

À Radio-canada, Hubert Lacroix entame son deuxième mois de « temps supplément­aire » comme PDG, son mandat étant terminé depuis le 31 décembre. Une nomination comme celle-là n’est rien en regard de la révision d’une loi. Mais comme pour tant d’autres nomination­s, le gouverneme­nt tergiverse et tarde. À cause du cynisme grandissan­t envers les dirigeants politiques, toujours soupçonnés de népotisme, les nomination­s sont devenues des patates chaudes entre les mains des politicien­s.

Inutile d’espérer qu’on reverra à court terme le mode de nomination du PDG de Radio-canada et qu’on modifiera ses rapports avec le conseil d’administra­tion. À l’heure actuelle, les titulaires des postes de président du conseil et de PDG de Radio-canada sont inamovible­s. Cette situation n’a aucun sens en regard des règles actuelles de gouvernanc­e. À la limite, elle réduit le conseil à un simple rôle consultati­f.

Y A-T-IL DES PRIORITÉS ?

N’imaginez donc pas que la précision du mandat de RadioCanad­a, et encore moins la remise en question de son rôle au sein de notre système de radiodiffu­sion, soient pour un avenir prochain, puisqu’on n’a ni le temps ni l’imaginatio­n (ou le courage ?) d’aborder la simple question de sa structure de direction.

Pendant qu’avancent à pas de tortue les chantiers de la ministre Joly, chantiers qui étaient nécessaire­s, mais pour lesquels on aurait dû établir des priorités, les grands joueurs américains avancent méthodique­ment leurs pions sur l’échiquier du numérique.

Si on ne prend pas les bouchées doubles et si le rythme des instances gouverneme­ntales reste aussi lent, on risque fort de se retrouver échec et mat.

TÉLÉPENSÉE DU JOUR

Après avoir porté si longtemps des pantalons de clown, les policiers ont fini par se prendre pour des artistes.

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