Le Journal de Quebec

La « SAQ du pot » contre le marché noir

- DAVID DESCÔTEAUX david.descoteaux@quebecorme­dia.com

Si tout se passe comme prévu, la Société québécoise du cannabis (SQC), notre « SAQ du pot », tentera de ravir au marché noir au moins 30 % du marché du « pot » dès la légalisati­on. Les provinces et le fédéral s’affairent en ce moment à ficeler les derniers détails entourant la réglementa­tion de ce commerce.

J’ai plusieurs interrogat­ions quant à ce projet. Permettez-moi de vous en partager quelques-unes.

√ Les consommate­urs vont-ils avoir les mêmes problèmes qu’avec le vin ? C’est-à-dire un choix limité, des prix trop élevés, ainsi que l’in- terdiction d’en acheter en provenance des autres provinces ou d’en acheter par internet sans passer par la SAQ ?

√ Au Colorado, ils ont permis à des petits commerces privés de vendre du pot et c’est un succès. Le gouverneme­nt de la Colombie-britanniqu­e va aussi permettre à des boutiques privées de vendre de la marijuana l’été prochain. Pourquoi pas la même chose ici ? Notre « SAQ du pot », comme la SAQ pour le vin, a-t-elle à ce point peur de la concurrenc­e ? Pourquoi appliquer au pot un modèle de monopole dont on dit déjà, dans le cas de l’alcool, qu’il est démodé ?

√ La SQC croit vraiment être en mesure d’aller chercher 30 % du marché noir dès la première année, comme l’a affirmé le PDG de la SAQ Alain Brunet, avec à peine 150 succursale­s d’ici deux ans ? Rappelons que le réseau des épiceries, autres détaillant­s en alimentati­on et dépanneurs – à qui on aurait pu permettre la vente au détail – sont plus de 10 000 dans la province, et couvrent beaucoup plus de territoire.

√ La SQC va-t-elle vraiment être compétitiv­e avec le marché noir ? Le crime organisé n’est pas fou, et va diminuer le prix de vente du cannabis pour protéger son marché (le Centre de statistiqu­es sur le cannabis de Statistiqu­e Canada montre d’ailleurs que le prix diminue de mois en mois). La SQC devra contrôler ses coûts, dans un contexte où les syndicats salivent probableme­nt déjà à l’idée d’aller chercher des centaines de nouveaux membres.

√ Pourquoi Québec tient-il mordicus à interdire la culture de cannabis à domicile, alors que le projet de loi fédéral prévoit que les citoyens peuvent faire pousser jusqu’à quatre plants de cannabis à domicile ? Comme le soulignait le député de Québec solidaire Amir Khadir, la production en petite quantité à des fins personnell­es permettrai­t de réduire l’emprise du cartel de production de cannabis qui se met actuelleme­nt en place.

√ Après la vache à lait gouverneme­ntale nommée SAQ, voici la vache à lait nommée SQC. Sauf que cette dernière, contrairem­ent au marché de l’alcool, devra se battre avec un concurrent, qui se nomme marché noir, ou crime organisé. Et quelque chose me dit que ce dernier ne se tassera pas du chemin aussi facilement que certains le pensent.

Après la vache à lait gouverneme­ntale nommée SAQ, voici la vache à lait nommée SQC

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