Le Journal de Quebec

Plus riches, les anglos ? C’est désormais un mythe

La pauvreté est un problème grandissan­t dans les communauté­s anglophone­s

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L’image de l’anglais riche qui vit dans un manoir en haut d’une colline ne reflète plus la réalité, si l’on se fie aux plus récentes statistiqu­es. Les anglophone­s sont maintenant plus pauvres que les francophon­es au Québec et la tendance en inquiète plusieurs.

Cynthia Savard est une anglophone de Longueuil qui reçoit de l’aide sociale (voir autre texte).

La femme de 37 ans n’a pas assez d’argent pour se payer une connexion internet. Elle doit se rendre dans un café près de chez elle pour naviguer sur le web.

Elle est loin d’être la seule dans sa situation. « L’an passé, plus de la moitié de notre clientèle était sans emploi ou à faible revenu », explique Kevin Erskine Henry du South Shore Community Network, qui offre des services aux anglophone­s de la Rive-sud.

PAS TOUS À WESTMOUNT

Lorraine O’donnell, professeur­e à Concordia, estime qu’il y a un problème grandissan­t de pauvreté chez les anglophone­s, une réalité souvent méconnue des francophon­es.

« Ah oui, nous vivons tous à Westmount », ironise Michelle Eaton-lusignan de l’organisati­on communauta­ire anglophone de Lanaudière, en référence à ce coin réputé aisé de Montréal.

Le revenu moyen des anglophone­s est plus élevé que celui des francophon­es en raison d’une petite minorité très fortunée qui tire la statistiqu­e vers le haut, explique Jack Jedwab de l’associatio­n des études canadienne­s.

Mais en réalité, les chiffres montrent qu’une plus grande proportion d’anglophone­s que de francophon­es vivent sous le seuil de faible revenu et sont au chômage (voir encadré).

Dans les Cantons-de-l’est, les maisons du type architectu­ral importé de la Nouvelle-angleterre, associées à l’élite anglophone, existent encore.

« Mais aujourd’hui, ce sont des francophon­es qui vivent dedans », observe Gerald Cutting de l’associatio­n des Townshippe­rs.

Plusieurs raisons expliquent cette réa- lité. Le Journal publiait un reportage hier sur les anglophone­s qui se sentent discriminé­s sur le marché de l’emploi. De nombreux jeunes diplômés universita­ires quittent donc la province.

SITUATION « CRITIQUE »

Les jeunes anglophone­s qui restent sont souvent les moins éduqués et ont donc de plus faibles revenus, explique Michelle Eaton-lusignan.

Cet « exode » fait en sorte que la population des petites communauté­s anglophone­s en région est vieillissa­nte.

Ces personnes âgées vivent souvent loin de leurs enfants, ces derniers ayant choisi de vivre à Toronto, à Vancouver ou aux États-unis.

« La situation est critique », dit Mme Eaton. Beaucoup d’aînés anglophone­s dépérissen­t d’autant plus vite que leurs enfants sont loin d’eux et ne peuvent les aider.

« Les anglophone­s font beaucoup de bénévolat, mais l’âge des bénévoles augmente. On peut se retrouver avec une personne de 80 ans qui en aide une autre de 93 ans », illustre-t-elle.

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PHOTO DOMINIQUE SCALI Cynthia Savard dans son appartemen­t de Longueuil. Elle a récemment décidé de se prendre en mains et d’intégrer le marché du travail.

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