Le Journal de Quebec

« Moi, mon enfant »

- JOSEPH FACAL joseph.facal@quebecorme­dia.com

Allez lire le dossier paru dans Le Devoir d’hier sur ces parents qui font la pluie et le beau temps à l’école.

Ils sont convaincus que « leur » enfant est spécial, qu’il n’a jamais tort, qu’on ne doit rien lui refuser, qu’ils savent mieux que l’enseignant ce qui est bon pour lui.

« Mon enfant ne lira pas ce volume. Choisissez plutôt un roman historique. »

« Son dossier scolaire doit parvenir aux collèges privés les plus réputés en prévision de l’admission au secondaire. Avec un C, elle ne pourra jamais entrer. Changez sa note ! »

« Excusez mon fils, nous avons fait des crêpes ce matin. Il en voulait et ç’a été plus long que prévu. » C’est dit pour « justifier » son retard.

FAIBLES

Les profs rapportent que les agendas des enfants reviennent remplis de commentair­es parentaux.

Des parents qui s’engagent à fond dans la réussite éducative de l’enfant et qui sont des partenaire­s du prof ? Non.

Les agendas sont « barbouillé­s de commentair­es des parents : en désaccord avec tel devoir, pas certains de telle méthode, outrés de telle activité, indignés de telle punition administré­e à leur enfant ».

Les pauvres profs font ce qu’ils peuvent : « On a beau leur expliquer qu’on en a 28 à gérer, on dirait qu’ils n’arrivent pas à comprendre qu’on n’enseigne pas à leur enfant tout seul dans la classe ! »

On pourrait croire que ces parents qui se fichent du cadre scolaire sont autoritair­es à l’excès.

C’est exactement le contraire : leur attitude illustre plutôt leur faiblesse.

S’ils veulent faire la loi à l’école, c’est parce que l’enfant fait la loi à la maison.

Le petit a de la misère avec un devoir ou n’est pas content d’avoir été puni à l’école.

Le parent va donc, en son nom, contester le devoir ou la punition.

Le parent devient le commis du petit qui tire les ficelles. À la maison, ce n’est plus : « il n’y a pas de gâteau si tu ne manges pas tes épinards ».

C’est devenu : « on négocie, tu manges deux belles bouchées d’épinards et on passe au gâteau, OK minou? »

Après les repas, les enfants en viennent à vouloir choisir le lieu des vacances et quelle auto acheter.

Pas fou, l’enfant apprend à exploiter à son avantage cette dynamique de négociatio­n.

Comme il n’est pas pris en charge par ses parents, qui ont abdiqué leur autorité, il prend en charge lui-même.

ABDICATION

Bien intentionn­és, ces parents se disent sans doute qu’ils ne veulent pas élever leurs enfants comme eux-mêmes l’ont été.

Ils confondent cependant la façon d’exercer l’autorité, qui doit évoluer, avec le besoin d’autorité qui, lui, est éternel et indispensa­ble.

L’enfant fait la loi comme s’il était un adulte, parce que l’adulte, lui, se comporte comme un enfant.

Le parent devient le commis du petit qui tire les ficelles.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada